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«Horresco referens», du latin pour «je frémis en le racontant». C’est l’une des maximes préférées d’Éric Monier, directeur de la rédaction de LCI. Une phrase que pourrait prononcer aujourd’hui Anne Saurat-Dubois, journaliste pour BFM-TV, qui a décidé de briser le silence. La journaliste a porté plainte lundi auprès du procureur de Paris. Elle accuse Éric Monier de harcèlement sexuel et de harcèlement moral, lorsque celui-ci était directeur de la rédaction de France 2. Selon Anne Saurat-Dubois, son refus de coucher avec son supérieur hiérarchique a entraîné la fin de son parcours professionnel à France 2. En plus de son témoignage, BuzzFeed News a pu s’entretenir avec 13 journalistes, dont 12 femmes, qui ont travaillé avec Éric Monier. Ces témoins racontent le sexisme pesant qu’il faisait régner, ses remarques de «gros dégueulasse» et l’avertissement que les femmes se passaient entre elles : «Ne restez pas seule avec lui.» Des informations qu’Éric Monier n’a pas souhaité commenter.

Plainte pour harcèlement sexuel et moral

Ce 31 octobre, les services du procureur de Paris ont reçu la plainte d’Anne Saurat-Dubois. La journaliste porte plainte contre Éric Monier pour harcèlement sexuel et harcèlement moral. Selon nos informations, c’est un déjeuner en 2012 qui est au cœur de la plainte. Alors que la jeune journaliste travaille en CDD pour France 2, Éric Monier lui propose un bilan de compétences autour d’un déjeuner. Elle prépare une note sur son travail et les marges de progression qu’elle pense avoir au sein de la rédaction. «La discussion a très vite dérapé sur sa vie sexuelle. Il me parle de sa vie sexuelle d’avant, quand il était correspondant à l’étranger», raconte la journaliste à BuzzFeed News. «À ce moment-là je suis extrêmement mal à l’aise. Et là il continue, me dit que son type, c’est les blondes de 25 ans. Là, je me tasse sur ma chaise, je commence à trembler. Puis il m’a fait une proposition ferme.» Proposition que la journaliste doit refuser plusieurs fois.

C’est alors qu’Éric Monier en serait venu aux menaces, expliquant à la journaliste qu’il pouvait faire de sa vie «un enfer», si elle s’obstinait à repousser ses demandes. Sous le choc, la journaliste quitte son travail quelques jours, et revient à France 2 avec l’espoir que cette menace ne sera pas mise à exécution. «Tout le monde sait qu’il faut pas déjeuner seule avec lui» lui expliquent les collègues à qui elle raconte le déjeuner avec Éric Monier. «Tout le monde était au courant de son comportement».

Deux journalistes qui ont recueilli les confidences d’Anne Saurat-Dubois dans les mois qui ont suivi le déjeuner avec Éric Monier confirment le récit de la jeune femme auprès de BuzzFeed News. Le premier, qui n’a pas souhaité témoigner, même sous couvert d’anonymat, nous a fait part de la détresse de la jeune femme, et de la volonté d’Éric Monier, selon lui, de mettre fin au plus vite à son parcours à France 2.

De son côté, Claire*, qui occupe actuellement un poste de responsabilité à France Télévisions et qui préfère témoigner anonymement, confirme les difficultés rencontrées par Anne Saurat-Dubois pour travailler sereinement au sein de la rédaction. À l’époque, elles travaillent toutes les deux pour l’émission «Télématin». «On devait tester tous les jeunes journalistes en plateau. Pour voir s’ils étaient bons à l’antenne. Sauf Anne. Elle a été refusée.» Pourtant, un membre de la production de l’émission décide de passer outre. «Éric Monier est devenu agressif quand il l’a appris, sa réaction semblait personnelle, et pas professionnelle, d’autant qu’Anne était très douée dans ce qu’elle faisait», se souvient Claire. Finalement, la jeune femme lui raconte le comportement d’Éric Monier, les avances refusées, et la rancœur de son patron. «J’ai su tout de suite que c’était vrai, je n’ai pas été surprise une seconde», explique Claire, qui a elle aussi eu vent des rumeurs qui courent sur le comportement du directeur de la rédaction à l’égard des femmes. (…)

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