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A moins d’un mois des élections législatives, Angela Merkel a choisi d’aborder d’elle-même, pour la première fois, le thème de l’immigration, afin de répondre à ceux qui lui reprochent de l’esquiver.

(….) Pourquoi la question des réfugiés, qui a dominé le débat en 2015 et en 2016, est-elle devenue si marginale à l’approche des élections ? Les explications tiennent d’abord aux intérêts des différentes familles politiques. Les conservateurs, d’abord : après avoir fulminé contre la politique d’accueil de la chancelière, l’aile droite de la CDU et la CSU ont décidé de taire leurs critiques, conscientes que leurs divisions internes risquaient de leur faire perdre la chancellerie. ” Les critiques ont cessé après la déclaration de candidature de Schulz – fin janvier – , quand il est monté dans les sondages et où on a pu croire qu’il risquait de battre Merkel “, rappelle Robin Alexander, journaliste à Die Welt, auteur d’un best-seller sur la politique de la chancelière envers les réfugiés (Die Getriebenen, Siedler, non traduit), paru en mars.

Les Verts et Die Linke (gauche radicale) sont dans le même embarras : dans la mesure où leur électorat a majoritairement approuvé la politique d’accueil de Mme Merkel, il leur est difficile de la combattre aujourd’hui sur ce terrain. Quant au SPD, sur ce sujet comme sur d’autres, il doit se démarquer de la CDU/CSU mais sait qu’il ne peut les attaquer trop frontalement, au risque de se voir rappeler qu’il a gouverné pendant quatre ans à leurs côtés et qu’il n’est pas le mieux placé pour fustiger un bilan qui est aussi le sien. Cette prudence s’explique enfin par la peur de l’extrême droite, avec en mémoire les scores très élevés obtenus par le parti Alternative pour l’Allemagne (AfD) en 2016. Notamment en Mecklembourg-Poméranie-Occidentale, le fief électoral de Mme Merkel, où l’AfD a devancé la CDU, une première pour l’extrême droite allemande depuis la seconde guerre mondiale.

Créditée de près de 15 % des voix aux législatives fin 2016, l’AfD plafonne aujourd’hui à 9 %-10 %. Or, si ce reflux est dû en partie au triste spectacle offert par les dirigeants du parti incapables de mettre fin à leurs querelles, il s’explique aussi par la mise au second plan de la question migratoire dans l’agenda politique et le paysage médiatique. ” Beaucoup d’Allemands continuent de penser que Merkel a préféré les enfants des autres aux siens pendant la crise des réfugiés. Mais depuis, d’autres questions dominent, l’avenir de l’Europe avec le Brexit, la dégradation des relations de l’Allemagne avec les Etats-Unis, la Russie et la Turquie. Merkel a peut-être déçu comme “mère”, mais elle rassure en tant que “dompteuse” de ces grands animaux dangereux que sont Trump, Poutine et Erdogan “, explique Stephan Grünewald, fondateur de l’Institut Rheingold, spécialisé dans l’étude de l’opinion publique.

Accusée par l’extrême droite et une partie de son camp d’avoir ” perdu le contrôle ” du pays en refusant d’en fermer les frontières en 2015, Mme Merkel fait campagne ” pour la sécurité et -l’ordre “, l’un des slogans les plus utilisés sur les affiches de la CDU. Pour l’emporter le 24 septembre, la ” chancelière des réfugiés “, comme l’ont appelée ses adversaires, sait qu’elle a intérêt à se présenter en candidate de la stabilité.

(…) Le Monde

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