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En refusant de s’aligner sur certaines positions défendues par l’aile droite de son parti, la chancelière espère que son discours peut convenir à des électeurs de gauche. Analyse de Thomas Wieder, correspondant du Monde à Berlin.

Sans en avoir l’air, voici donc bientôt deux mois que celle qui dirige l’Allemagne depuis 2005 est à nouveau en campagne. Une campagne qui ne dit pas son nom, une campagne subliminale, mais une campagne malgré tout : désormais, quand la chancelière s’exprime, c’est également la candidate qu’il faut entendre.

Quelle candidate ? Très clairement, Mme Merkel a choisi son camp. Le 6 décembre 2016, au congrès de l’Union chrétienne démocrate (CDU), elle n’a ainsi pas hésité à s’opposer à la majorité des délégués de son parti désireux de restreindre l’accès à la double nationalité pour les jeunes Allemands d’origine étrangère. Quinze jours plus tard, après l’attentat de Berlin, elle s’est à nouveau démarquée de l’aile droite de sa majorité, que ce soit en refusant de parler d’« état de guerre » ou en continuant de justifier sa politique d’accueil des réfugiés au nom d’une société « libre, humaine et ouverte », comme elle l’a réaffirmé dans ses vœux du 31 décembre. […]

Cette situation n’a cependant pas que des désavantages pour Mme Merkel. En refusant de s’aligner sur les positions défendues par l’aile droite de son parti, elle cultive en effet une image de chancelière modérée, plus pragmatique qu’idéologue, dont le discours peut convenir à de nombreux électeurs écologistes ou sociaux-démocrates. Des électeurs auxquels elle n’a pas manqué d’envoyer quelques messages. […]

Pour l’heure, cette stratégie de « triangulation » ne semble pas desservir Mme Merkel. Dans les sondages, elle jouit en effet toujours d’une forte popularité parmi les électeurs sociaux-démocrates et écologistes. […]

Au sein de la famille conservatrice, ce pari ne fait pas l’unanimité. Pour certains, les revers essuyés par la CDU et les succès enregistrés par l’AfD lors des scrutins régionaux de l’année 2016 ont justement démontré les dangers de ce positionnement. D’où l’importance qu’ont pour Mme Merkel les élections régionales prévues en mars dans la Sarre puis en mai dans le Schleswig-Holstein et en Rhénanie-du-Nord-Westphalie : en cas de nouveaux revers de la CDU, il n’est pas sûr que Mme Merkel puisse encore imposer à ses troupes la stratégie de campagne ébauchée ces deux derniers mois.

Le Monde

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