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Tribune de Vincent Desportes, Général de l’armée de terre et professeur des universités associé à Sciences Po.

S’il est un domaine de l’action régalienne où la logique de résultat doit l’emporter sur celle des moyens, un domaine où il est dangereux de sacrifier le futur au présent, c’est bien celui de la défense. Et pourtant, c’est aussi celui où ces règles élémentaires ont été ignorées depuis cinq ans, au mépris du premier des principes stratégiques : proportionner les moyens à l’enjeu. L’impossible a été demandé aux armées : elles l’ont fait, mais à quel prix ?
Nos armées ont été engagées sans retenue. A l’étranger, elles l’ont été de manière réactive sans que de ces déploiements – des pays baltes à l’Afrique centrale jusqu’au Moyen-Orient – émerge une stratégie solide. Sans, hélas également, que la France arrive à dépasser ses brillants succès tactiques pour les transformer en succès stratégiques durables.

A l’intérieur, Sentinelle use inutilement nos forces à contre-emploi dans une gabegie capacitaire incapable de prévenir le prochain attentat.
Que les armées soient engagées, c’est normal. Mais qu’elles le soient aujourd’hui au détriment de notre défense de demain, c’est dangereux.

[…] Il aura fallu attendre les attentats de 2015 pour que le gouvernement se résolve à faire un geste symbolique, laissant d’ailleurs aux successeurs le soin de payer l’addition. La très insuffisante augmentation du budget 2017 (600 millions) est sans rapport avec les réinvestissements indispensables pour rééquilibrer l’équation moyens/missions. Et si chacun se réjouit de l’accroissement de nos exportations de matériels militaires, il n’a aucune retombée directe sur le redressement de ces dernières.
En cause, l’extravagante contradiction entre la surintensité de l’emploi des forces, la surexposition stratégique de la nation et l’absence de mesures à la hauteur de cette démesure. Une faute stratégique et politique que la France paiera longtemps.
Le Monde

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