Fdesouche

Les «bourgeois bourrins», frères ennemis des «bourgeois bohème», pourraient refléter la droitisation ambiante, de l’élection de Donald Trump au plébiscite de François Fillon.

Trébuchant dans la cendre de l’apocalypse trumpiste, encore sonnés par le phénix catho-libéral filloniste, les «producteurs d’intelligence» (comme disent les producteurs télé) rivalisent d’hypothèses pour expliquer la droitisation effrénée du monde. On sent bien, derrière les indéniables ressorts économiques, sociaux, voire xénophobes qui sous-tendent ces claques politiques, que se joue aussi dans nos démocraties fatiguées une sorte de contre-révolution culturelle. Contre-révolution disséquée dans un essai publié en mars (1) – soit avant les séismes précités – par un chasseur de tendances, qui y décrit l’émergence du «boubour». Et si, sous ses apparences de concept gag, le responsable, c’était lui ? Le «bourgeois bourrin» théorisé par l’essayiste Nicolas Chemla. Le yang du bobo, ce «bourgeois bohème» devenu bouc émissaire universel.

Pour faire simple, il s’agit d’un CSP + branché, généralement mâle, qui se détourne des «trois piliers de l’utopie bobo : justice sociale, mixité et protection de l’environnement». Utopie à l’agonie, insiste Chemla, qui, en une dizaine d’années, «s’est transformée en dystopie hipster», entre gentrification, rétromanie obsessive et progressisme mou, voire hypocrite. Jouissant d’un capital culturel équivalent à celui du bobo, le boubour n’est pas un simple réac ou un beauf. Il s’est construit en réaction à ce qu’il considère comme un déploiement excessif du politiquement correct, des luttes antiracistes et féministes, de l’écologie… Fatigué de s’excuser de ses privilèges, «le boubour n’est pas tant antibobo que postbobo», écrit l’auteur. Le boubour, c’est le lâchage, «dans une vie toujours sous contrôle. Marre de toujours faire attention à ce qu’on mange, à ce qu’on dit, à ce qu’on boit», voilà l’idée. Fuck le quinoa, le vélo et les indignés permanents sur Twitter. Vive la viande, les bagnoles et les blagues borderline. Glorification du bourrin comme autodéfense, à rebours du bien-faire et du bien-penser : «C’est plus un programme, un ensemble de valeurs, qu’un personnage. Sous des apparences parfois contradictoires, c’est le trait d’union entre Booba et Laurent Wauquiez.» Vaste programme.

(…) Libération

Fdesouche sur les réseaux sociaux