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Analyse de Nicolas Truong, journaliste au Monde et Responsable des pages Idées-Débats, sur la “droitisation du monde”.

La droitisation du monde est en cours. Et la gauche est sonnée, larguée, désarçonnée. En plein mea-culpa, plongée dans un exercice de contrition et parfois même d’autoflagellation. Cécité face au déclassement des middle classes, entre-soi culturel et médiatique, abandon de « l’Amérique du milieu » ou de la « France périphérique », fracture entre bobos et prolos, entre gagnants et perdants de la mondialisation : beaucoup de choses ont été dites sur les raisons d’une sidération, les causes d’une débâcle historique.

La gauche multiculturaliste, notamment active sur les campus américains, est particulièrement visée. Elle qui a souvent préféré l’identité à l’égalité, le souci des minorités à celui des ouvriers.

Elle qui n’a pas compris que le conservatisme est en mouvement. Qu’il avait muté. Qu’il a fait valser les oppositions entre l’ordre et la liberté. Elle qui n’a pas assez réalisé que le conservatisme pouvait entraîner une partie de la jeunesse, à la manière de La Manif pour tous en France. Que les soulèvements ne sont pas tous libertaires, mais également autoritaires. Et qu’un Mai-68 à l’envers se propageait à l’échelle planétaire. […]

Professeur à l’université de Virginie mais également réparateur de motos – comme quoi tout est décidément possible aux Etats-Unis, notamment être un intellectuel et rester au contact des classes populaires –, le philosophe américain Matthew B. Crawford considère le trumpisme comme une réaction à ce qui est perçu comme « une forme d’arrogance et d’hypocrisie des élites multiculturelles».

Des catégories privilégiées «qui apprécient le dynamisme et l’authenticité des quartiers ethniques avec leurs merveilleux restaurants, et les réservoirs de gardes d’enfants et autres personnels qu’ils offrent, mais qui n’envoient pas leurs enfants dans les écoles pleines d’enfants immigrés qui ressemblent à des centres de détention juvénile».

Remonté contre la «prétention morale» des progressistes à l’égard des classes « proscrites» qui souffriraient de « phobies» à soigner (de la xénophobie à la transphobie), Crawford déplore la séparation entre «ceux qui ne supportent que les inconvénients de l’immigration et les autres qui en récoltent tous les avantages». […]

Le Monde

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