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Article de “décryptage” de Jean-Baptiste de Montvalon, journaliste au Monde, sur l’identité nationale. Extraits.

Beaucoup voudraient la figer, mais l’identité nationale n’est pas gravée dans le marbre : elle évolue constamment au fil des époques et des pouvoirs en place.

[…] Qu’elle soit « heureuse », comme la qualifie Alain Juppé, ou plus couramment inquiète, l’identité a envahi le débat politique. Chacun est sommé de se situer sur cette thématique, qui n’est plus l’apanage de l’extrême droite ni même seulement de la droite. Bon gré mal gré, la gauche aussi se trouve contrainte de se positionner à cette aune. « Je ne dirais pas “nos ancêtres les Gaulois”, je vous dirais que le moment fondateur, c’est le moment où on ­devient citoyen, c’est plutôt la révolution de 1789», a ainsi déclaré Jean-Luc Mélenchon (Parti de gauche) le 25 septembre. Ce débat « nous oblige à réfléchir, à regarder, à lire, à se confronter », a ajouté le candidat à l’élection présidentielle. […]

Plutôt que de suivre à la trace les contours sinueux de cette notion au fil du temps, il paraît plus pertinent d’examiner ses soubassements, pour comprendre non pas tant ce qu’elle a successivement ­recouvert que sa fonction. Directrice de recherche au CNRS, Sophie Duchesne livre quelques clés. Une permanence universelle, d’abord : «On apprend aux enfants au biberon qu’ils sont de la nation à ­laquelle ils appartiennent. Ce qui leur permet de se sentir responsables et concernés par les décisions prises dans leur pays. Si on enlève cela, on aboutit à une forme d’individualisation dans laquelle il n’y a plus de citoyenneté. » Cet apprentissage est bénéfique jusqu’à un certain point. « Comment apprendre à faire partie d’un groupe sans que cela devienne un processus d’exclusion ? Comment être solidaire d’un groupe sans être adversaire d’un autre ? », interroge la chercheuse. […]

Nécessaire pour créer de la citoyenneté, le processus d’identification collective, cette fameuse identité nationale serait inclusive et tournée vers l’avenir en période de prospérité ou tout au moins de stabilité ; exclusive et tournée vers le passé en période de crise. « On ne peut pas penser la démocratie sans attachement national », estime la chercheuse Sophie Duchesne.

Mais ce débat est aujourd’hui totalement perverti. La nation, ce n’est pas de l’histoire, un passé mythifié, cela devrait être du futur. L’identité, ce n’est pas un retour en ­arrière. C’est ce que l’on fabrique.

Le Monde

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