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Tribune de l’islamologue franco-marocain Rachid Benzine, né au Maroc, sur le financement étranger des mosquées en France, qui est, selon lui, “un mauvais débat”.

Il est de la responsabilité des pouvoirs publics de se chercher des interlocuteurs représentatifs et efficaces au sein de l’islam de France, et de désirer pour celui-ci des institutions solides à l’image de celles des autres grandes confessions religieuses du pays. En même temps, il n’est pas du ressort de l’Etat laïc de définir quelles doivent être ces structures, et encore moins de définir le contenu religieux qu’il leur appartient de transmettre. […]

Mais pourquoi cette phobie des financements étrangers concernant l’islam de France, et qu’entend-on par là ? Y a-t-il, de nos jours, des financements étrangers qui posent vraiment problème ? Est-ce que cette vision des choses résulte d’une juste connaissance de ce qui se passe ? […]

En fait, la majorité des musulmans de France étant originaires du Maghreb, c’est plus naturellement vers les pays d’Afrique du Nord que les associations musulmanes cherchent à se tourner, en particulier vers l’Algérie et le Maroc.

Or peut-on parler, au sujet de ces pays avec qui la France à une très longue histoire, de pays vraiment «étrangers» ? Ils sont, de surcroît, les pays de beaucoup de Français, puisqu’une large part des quelque six millions de musulmans de France, sans doute la moitié, sont des binationaux : Français et Algériens, Français et Marocains…

[…]

En réalité, tout ce débat cache des non-dits qui pèsent lourdement sur la « santé » de la démocratie française : la difficile acceptation de la bi-nationalité des Français originaires de l’ancien empire colonial. Jamais ne sont critiquées la bi-nationalité des Franco-Italiens, celle des Franco-Espagnols, celle des Franco-Portugais, celle des Franco-Israéliens, etc ; mais celle des Franco-Maghrébins est jugée comme une double allégeance impossible ou suspecte.

Or l’islam officiel des pays du Maghreb est un islam de concorde et de paix, et on ne peut que désirer qu’il le reste. C’est vers lui que continuent de se tourner l’immense majorité de nos compatriotes musulmans, et on ne voit pas quel intérêt la France aurait à couper le « cordon ombilical ». Au contraire, l’islam officiel de ces pays peut représenter une chance pour l’islam de France, dès lors qu’il est porteur d’une riche histoire, porteur de savoirs séculaires et d’héritages spirituels multiples, ce que ne peut inventer tout seul un « islam de France ». […]

Le Monde

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