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Pour Jean-François Bayart, politologue, professeur au Graduate Institute de Genève? le “tout-sécuritaire” est une mauvaise réponse au terrorisme.

Nombre de spécialistes affirment que l’Occident est tombé dans le piège que lui ont tendu Al-Qaïda, puis Daech, et que ses politiques sécuritaires alimentent le jihad, au lieu de le contenir.

Dans la douleur, nous devons être précis. Pas plus que les attentats anarchistes de la fin du XIXe siècle, les actes terroristes d’aujourd’hui ne constituent pas une menace stratégique pour notre pays.

Les attentats que le jihadisme islamique a multipliés au cœur du monde occidental depuis 2001 l’ont fait basculer dans un état d’exception permanent sans que le pire ait pu être conjuré. D’une part, les démocraties ont sacrifié leurs fondements, nonobstant les assurances initiales et les protestations vertueuses de leurs dirigeants. […]

Les Etats-nations occidentaux sont aujourd’hui devenus des Etats de sécurité nationale, dont l’obsession s’étend, au-delà du seul terrorisme, à l’immigration, à l’ultra-gauche anticapitaliste, aux lanceurs d’alerte. Ils ne répugnent plus à envisager des mesures rappelant leur passé le plus sombre, telles que la déchéance de la nationalité, en France, ou à les mettre en œuvre comme la confiscation des biens des réfugiés, au Danemark. […]

Il serait temps de suspendre cette fuite en avant. De réviser la politique étrangère qui nous a conduits là où nous en sommes, et dont les choix stratégiques tantôt ont enclenché la machine infernale, tantôt empêchent de la désamorcer. De renoncer aux politiques néolibérales qui ont déchiré le tissu social, et au discours culturaliste qui a communautarisé le pays, sous prétexte d’en exalter l’identité nationale. Et, dans l’immédiat, d’en revenir à une police de renseignement, de proximité et d’infiltration, dès lors que la très dispendieuse surveillance numérique s’avère vaine. […]

D’autre part, cette politique sécuritaire a échoué. Elle n’a pas évité les attentats, qui n’ont jamais été aussi nombreux depuis 2001. Elle n’a pas tari le vivier des jihadistes. Elle n’a pas endigué les flux de migrants et de réfugiés, faute d’en tuer assez et de pouvoir contraindre les Etats partenaires du Moyen-Orient et d’Afrique à retenir les candidats au départ. Tout indique que l’impuissance du régime d’exception permanente et de surveillance totale à conjurer les dangers qu’il prétend éliminer ne se démentira pas. […]

Libération

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