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Article du Monde sur une famille syrienne arrivée France, il y a 6 mois.

Il est 17 heures. Nour rentre du lycée, un gros bonnet enfoncé sur la tête, cachant tous ses cheveux. Arrivée fin janvier, elle est scolarisée depuis mars. Elle confie se sentir un peu seule. Et désorientée : pour la première fois de sa vie, sa classe est mixte ; et pour la première fois depuis six ans, elle a dû retirer son voile et laisser, en classe, ses cheveux noirs à la vue de tous. «C’est comme ça ici, alors je vais m’habituer», dit-elle poliment.

Les trois hommes ont officiellement obtenu, en tant que réfugiés, leur carte de résident de 10 ans. Leurs droits sociaux ont été activés plus vite qu’espérés : CMU, RSA, inscription à la mission locale pour les fils, pour Ahmad, à Pôle emploi.

De gauche à droite : Mohamad 23 ans, Abdalrahman 20 ans, Ahmad 47 ans, Abdulhakim 1 an et demi, Khaoulah 43 ans, et Nour 17 ans

«J’ai préféré que les grands partent vite, car c’est pour eux que c’était le plus dangereux là-bas», explique Khaoulah, la mère, aujourd’hui, fermant les yeux comme pour chasser le souvenir terrible du moment du départ. «Ils risquaient de se faire enrôler de force dans l’armée de Bachar». Sa fille, Nour, 16 ans, n’avait pas pu retenir ses larmes : «Je ne savais pas si j’allais les revoir.» […]

La vie à six a enfin repris, dans le F4 de Saint-Etienne. L’appartement est aujourd’hui meublé sobrement. Grâce à l’aide d’Emmaüs, des canapés de seconde main ont pris place dans le salon ainsi qu’un écran cathodique relié à une parabole. […]

Six mois après l’emménagement d’Ahmad et ses fils, ce n’est cependant toujours pas leur nom, mais celui de l’association Entraide Pierre Valdo qu’on lit sur l’interphone. Le bail devait initialement leur être confié plus tôt. «On le mettra à leur nom dès que madame aura son titre de séjour, ce qui devrait intervenir rapidement», promet Didier Couteaud, directeur départemental de la cohésion sociale, en charge de superviser l’accueil des réfugiés dans la Loire. Le ménage pourra alors percevoir le RSA en tant que famille et des aides au logement pour payer le loyer. Il n’y aura plus d’intermédiaire entre la famille et le bailleur. […]

Quand leur mère confie qu’elle espère, un jour, revenir en Syrie, Abderrahmane, lui, fait non de la tête : «La plupart de mes amis sont morts. Je n’ai plus rien à faire là-bas.» Hakim vole encore un gâteau sur la table basse. Sa mère sert un thé brûlant, « à la syrienne ». Ahmad a dû chercher longtemps avant de finir par trouver à Saint-Etienne un thé à leur goût, et une théière qui convienne. « Alors qu’en Syrie, des théières, y en a partout ! »

Le Monde

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