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Forte longévité des carrières, cumul des mandats et des fonctions… En jouant le maintien à tout prix, les élus donnent aux citoyens le sentiment que leur démocratie fonctionne en vase clos. Comment insuffler de l’air frais ?
Les chiffres sont sans ambiguïté : à l’Assemblée ­nationale, l’entrée «directe» de citoyens dénués ­d’expérience politique est en voie de disparition. « Les trajectoires menant au Palais-Bourbon impliquent un ­investissement professionnel précoce dans la politique et la détention préalable de plusieurs postes de pouvoir, ce qui implique un savoir-faire», explique Luc Rouban, directeur de recherche au CNRS (Cevipof), dans une étude sur le profil des députés élus en 2012. Un tiers des députés socialistes ont ainsi « fait leurs premières armes au sein du PS, très souvent comme ­assistants parlementaires ou membres de cabinets municipaux ou régionaux », poursuit-il, en soulignant une ­ «certaine professionnalisation des députés». […]
Avec la professionnalisation, les parcours des hommes politiques de ce début de XXIe siècle se ressemblent de plus en plus.
“Ils militent dans une organisation de jeunesse, ils intègrent un institut de sciences politiques, d’économie ou de droit, ils deviennent assistants d’élus, ils sont membres d’un cabinet, ils briguent un mandat, explique Rémi ­Lefebvre, professeur de sciences politiques à l’université Lille-II.
C’est comme cela qu’ils apprennent les ficelles du métier – la capacité à faire campagne, à diviser ses adversaires et à acquérir le sens pratique dont parle Pierre Bourdieu. Le stade ultime de la professionnalisation, c’est l’absence ­totale de passage par une vie professionnelle autre que la politique. Ce phénomène touche tous les partis, à droite comme à gauche – y compris le Front national. » Au risque, parfois, de créer un monde à part. [….] Pour Eric Keslassy, auteur, en 2009, d’un rapport sur la diversité pour l’Institut Montaigne et enseignant à Sciences Po, le mandat unique, et surtout sa limitation dans le temps, permettrait enfin de faire respirer la démocratie. « Il faut absolument rebattre régulièrement les cartes car au bout d’un moment les habitudes priment et la motivation s’érode. Lors du premier mandat, l’élu s’installe, lors du deuxième, il donne sa pleine mesure, lors du troisième, il y a une chute de l’activité – la productivité est en recul, diraient les économistes ! Les élus objectent qu’il serait dommage de se priver d’un élu qui a de l’expérience, mais de nouveaux venus peuvent, eux aussi, réussir leur apprentissage et ­devenir de bons élus. Il est sain, pour la démocratie, que de nouveaux profils parviennent à émerger. » [….] Le Monde

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