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Gérard Noiriel, directeur émérite à l’Ecole des hautes études en sciences sociales, qui a beaucoup travaillé sur l’histoire de l’immigration, se penche sur la pertinence des «études blanches».

Qu’est-ce qu’être blanc ? Faut-il parler sans tabou de la couleur de peau et de la race ? Alors que depuis une poignée d’années, des chercheurs français se sont emparés de la «question blanche» – qu’ils appellent parfois la «blanchité» – à la manière des whiteness studies anglo-saxonnes, l’historien Gérard Noiriel présente les limites de cette catégorie. […]

Historiquement, le mot racisme est né pour dénoncer des discours et des pratiques politiques visant à exclure, et parfois même à exterminer, des groupes en fonction de leur religion, de leur origine… Il ne s’agit pas, évidemment, d’excuser les discours et les comportements populaires illustrant une intolérance à l’égard des «Blancs», mais utiliser le terme de «racisme» pour les qualifier, c’est vider ce concept (et l’idéal universaliste qu’il véhiculait au départ) de son sens en le banalisant. On voit bien aujourd’hui les effets délétères de cette banalisation. Quand chacun peut accuser son voisin d’être «raciste», c’est que le mot a perdu toute signification politique.

Dans le débat public, on dit rarement «blanc». On se pense encore plus rarement «blanc». Est-ce un tabou ? Est-il en train de sauter ?

La façon dont les individus se perçoivent est en effet toujours tributaire des références que fabriquent les professionnels du discours public. Néanmoins, une identité se définit toujours aussi par opposition à ce qu’elle n’est pas, dans la logique du «eux» et «nous». Un individu ne peut se sentir «blanc» que par opposition au «noir» ou au «jaune». Ce n’est pas un hasard si la couleur de peau a d’abord été perçue comme un facteur identitaire dans l’espace colonial. Jusqu’en 1914, dans l’Hexagone, les Français ne se sentaient pas blancs, tout simplement parce que le nombre des immigrants issus de l’empire colonial était extrêmement faible. […]

Cette notion permet-elle de mieux cerner certains privilèges dont bénéficient les Blancs ?
Il est certain que dans le contexte de la domination coloniale, le fait de pouvoir se dire «blanc» a servi pour légitimer des privilèges. Mais cet argument a constamment été associé à d’autres critères relevant notamment de l’éducation et de la compétence. […]

Qui sont ceux qui emploient le terme «Blanc» et pourquoi ?

Le fait que certaines associations antiracistes aient pu reprendre à leur compte le slogan du «racisme antiblanc» (thème que le FN a mis en circulation dès son premier congrès, en 1973) en dit long sur leur désarroi actuel. Leurs porte-parole ont présenté comme une nouveauté un phénomène aussi vieux que le racisme. Lorsque des groupes stigmatisés occupent localement une position hégémonique, parce qu’ils sont les plus nombreux dans un quartier déshérité, certains de leurs membres peuvent avoir des comportements discriminatoires à l’égard de ceux qui sont issus du groupe majoritaire, mais qui vivent dans ces quartiers.

Le problème est de savoir quelle conclusion on peut tirer de ces constats.

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