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Ils sont plusieurs millions d’adultes en France, chaque été, à ne pouvoir partir ne serait qu’un jour ou une semaine. Organisée ce mercredi, la journée mondiale des «oubliés des vacances» doit permettre à 70 000 d’entre eux de s’évader pendant vingt-quatre heures. Le public : des mères célibataires cumulant difficultés matérielles et charges familiales. Des femmes seules avec leurs enfants qui, malgré la précarité, rêvent de repos au soleil, loin de leur quotidien.

Parmi ces millions d’adultes, Libération en a choisi quatre Mila, Aïcha, Amélia et Kankou. (Les prénoms ont été changés)

Mila , Malienne arrivée en France en 2011, ne partira pas en vacances. Trop cher, pour cette sans-papier qui a fui Bamako et son mari violent. Assise sur une chaise longue, cette femme souriante et calme, yeux en amande et queue-de-cheval, profite de Clichy Plage avec son fils. […]

Avant de reconnaître, timidement : «Je rêve aussi de pouvoir m’offrir de vraies vacances, de pouvoir retourner dans mon pays natal, revoir ma famille et me replonger dans mes souvenirs d’enfance.» […]

Diplômée en couture, Mila tenait un atelier de confection de pagnes dans la capitale malienne lorsqu’elle a décidé, du jour au lendemain, de tout plaquer. «Mon mari me battait constamment. Un matin, j’ai décidé de fuir pour protéger mon enfant. J’ai quitté le Mali par peur qu’il me retrouve. Je suis venue en France, il y a quatre ans, grâce à mes économies et la vente de mes bijoux en or, légués par ma mère. Ça fait mal, mais j’ai fait ce sacrifice pour une vie meilleure », raconte-t-elle. Hébergée chez un tiers, elle «ne travaille pas». […]

Un sourire qu’Aïcha , comme les autres femmes, tente de garder. […] Sans activité (elle touche 800 euros d’aides sociales) , elle est retournée vivre chez ses parents avec ses enfants, à Sevran (Seine-Saint-Denis), après une expulsion de son logement, il y a un mois, pour cause d’impayés laissés par son ex-mari. […]

Ses vacances idéales ? Dans n’importe quel pays, mais loin de la France, loin «de ce que je connais, dans un endroit où je pourrais me reposer et profiter de mes journées».

Autre vie, mais même situation : Amélia, 23 ans, est mère d’une fille de 5 ans qu’elle élève seule. Brune aux yeux verts et à la silhouette sportive, elle occupe un appartement à Bagneux (Hauts-de-Seine), où elle fait vivre sa petite famille grâce à de maigres prestations sociales (550 euros de RSA par mois). Une fois le loyer et les charges fixes réglés, il ne lui reste plus rien.

Les bons Vacaf, délivrés par la Caisse d’allocations familiales ? «Ça fait trois ans que je ne les utilise plus : la CAF prend en charge 70 % de ma location, mais pas les autres choses, comme l’alimentation ou le transport. Même aidée, je ne peux pas payer le reste.»

A quelques kilomètres, au nord-est de Paris, Kankou, mère célibataire, élève seule ses trois enfants. Séparée depuis 2010, elle vit à Villepinte (Seine-Saint-Denis) avec un temps partiel (600 euros) d’employée de cantine scolaire.

L’ex-mari ? «Il refuse de travailler légalement pour éviter de me verser une pension alimentaire.» Pour cette quadragénaire, dire stop à un mariage destructeur pour élever seule ses enfants, c’est déjà accéder à une forme de liberté. Même si elle avoue ne pas être contre des vacances au Brésil, «pour profiter des plages de sable fin et des hôtels aux vues magnifiques». En attendant de pouvoir un jour réaliser son rêve, elle continue de se lever chaque matin pour aller travailler, de bonne heure, à quarante minutes de chez elle. Même pendant l’été.

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