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Le journaliste Jean-François Kahn fait le bilan de l’année politique avec FigaroVox. Pour lui, le trio Nicolas Sarkozy, François Hollande, Marine Le Pen représente une impasse politique pour la France.

Le constat est effarant : l’hypothèse la plus probable est que l’on retrouve en 2017 les cinq mêmes candidats qu’en 2012: François Hollande, Nicolas Sarkozy, Marine Le Pen, mais aussi François Bayrou et Jean-Luc Mélenchon. C’est un phénomène quasiment unique en Europe. La Russise de Poutine est le seul autre endroit où les candidats sont les mêmes d’une élection à l’autre.

L’hypothèse [de l’élection de Marine Le Pen] parait improbable, mais plus impossible. On ne peut pas l’exclure dans le cas d’un second tour face à François Hollande. Mais je crois qu’il s’agirait également d’une élection par défaut et que les conséquences seraient tout aussi catastrophiques. Là encore, aucun patriote ne peut le souhaiter.

Les moments de grandes dynamiques sont toujours les moments où les élites en place explosent pour laisser place à une nouvelle génération d’élites, y compris d’une certaine manière en 1968. Mais tant qu’une élite est en place, elle se reproduit.

François Hollande, Nicolas Sarkozy, Marine Le Pen: plusieurs sondages montrent que près d’un Français sur deux ne veut plus voter pour eux. Comment analysez-vous cette crise de l’offre politique ?

Plus de 70% des Français ne veulent ni de Nicolas Sarkozy, ni de François Hollande, ni même de Marine Le Pen. Et pourtant, la plupart des Français se résignent à cette situation. Cela provoque une crise profonde dans le pays. Nicolas Sarkozy a tout de même un supporter en la personne de François Hollande. De même, l’ancien président de la République souhaite prendre sa revanche sur l’actuel locataire de l’Elysée. Et tous deux désirent absolument affronter Marine Le Pen.

D’une certaine manière, ces trois candidatures font «système». Marine Le Pen est la candidate providentielle pour François Hollande comme pour Nicolas Sarkozy. En 2007, les trois principaux candidats profitaient d’une vraie dynamique et d’un vrai élan. Aujourd’hui, les trois candidats incarnent trois rejets.

François Hollande paie ce qui est ressenti comme une trahison comparable à celle de Guy Mollet en 1956. Le président du Conseil avait été élu pour faire la paix en Algérie et il a accentué la guerre. Au Bourget, le candidat Hollande avait lancé un défi presque romantique à la finance. Une fois au pouvoir, il a fait exactement l’inverse. Par ailleurs, personne n’aurait pu imaginer que le levier de la politique gouvernementale socialiste serait la relance par l’offre, la baisse du coût du travail ou encore la compromission avec l’Arabie Saoudite en matière de politique étrangère: autant d’orientations ou de mesures honnies par la gauche ! […]

On fait également à Nicolas Sarkozy le procès de ne pas avoir tenu ses promesses. Or objectivement, ce n’est pas vrai. Nicolas Sarkozy a globalement fait ce pourquoi il avait été élu. Le problème c’est que cela n’a pas eu les conséquences que les gens en attendaient. […]

La déception a été grande également à l’égard de sa politique d’immigration. Les Français se sont aperçus que l’ «immigration choisie» signifiait en réalité «choisir l’immigration»: sous la pression patronale, le nombre d’immigrés de travail est ainsi passé de 105 000 à 210 000. N’oublions pas que Brice Hortefeux a fait passer une circulaire aux ambassades avec une liste de soixante métiers pour recruter des travailleurs immigrés. […]

Le FN de Marine Le Pen ne représente-t-il pas, malgré tout, une offre nouvelle ?

D’abord, il faut reconnaître que, selon certains sondages, elle est moins rejetée que François Hollande et Nicolas Sarkozy. Par ailleurs, il y a une grande différence dans la nature du rejet. Nicolas Sarkozy et François Hollande sont décriés par des gens qui ont voté pour eux. Marine Le Pen, elle, n’a jamais été au pouvoir et les Français hésitent à prendre le risque de voter pour elle. […]

Les journalistes, exactement comme les poissons sont attachés à l’eau, sont attachés à la bipolarité car c’est l’air qu’ils respirent. Ils ont donc tendance à démolir ce qui échappe à cela et ont joué un rôle dans cette rigidification du système bipolaire.

La présidente du FN a pris conscience de cet électorat-là, de ses aspirations et de ses craintes. Elle a inventé une doctrine qui est à 50% plus à droite que celle de Philippe de Villiers et à 50% plus à gauche que celle du Parti socialiste. Ainsi, elle tiré le tapis sous les pieds de ce qui pourrait être aujourd’hui Syriza. […]

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