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Professeur d’histoire à l’université de Cergy-Pontoise et chercheur associé à l’Institut d’Histoire du temps présent, Patrick Garcia explique comment le Panthéon est devenu l’un des plus forts symboles de la République et de la gauche et ne représente pas vraiment la nation. Quatre nouvelles personnalités doivent y faire leur entrée le 27 mai prochain : les résistants français Germaine Tillion, Pierre Brossolette et Geneviève de Gaulle et l’ancien ministre de l’éducation nationale sous la IIIe République Jean Zay, assassiné par la milice, vont entrer au Panthéon,.
Le choix de Jean Zay fait protester des associations d’anciens combattants, qui reprochent à l’ancien ministre d’avoir insulté le drapeau français dans son poème Le drapeau qu’il écrira en 1924 à 19 ans.
Ils sont quinze cent mille qui sont morts pour cette saloperie-là.
Quinze cent mille dans mon pays, Quinze millions dans tous les pays.
Quinze cent mille morts, mon Dieu !
Quinze cent mille hommes morts pour cette saloperie tricolore… […]

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Le Panthéon est la mémoire de la République et c’est une mémoire de gauche.

Notre enquête DataMatch montre que la nation ne choisit pas ses grands hommes à son image. Pourquoi ?
Il faut d’abord exclure les nombreux choix de Napoléon qui ne sont pas représentatifs.

Ensuite, le Panthéon est un lieu extrêmement sélectif, dont la fonction n’est pas d’être représentatif de l’ensemble des Français. Depuis sa «re-républicanisation» en 1885 avec l’entrée de Victor Hugo, Il s’est construit avec l’élection d’un certain nombre de grandes figures emblématiques des valeurs républicaines.

Qu’est-ce qu’un grand homme ?
Rentrent au Panthéon essentiellement des intellectuels, liés à la question des valeurs. Il ne s’agit pas seulement de grands écrivains, mais de grands écrivains engagés comme Émile Zola, ou emblématiques de l’Histoire de France, comme Alexandre Dumas. Ce dernier a aussi été choisi parce qu’il était métis : celui qui a domestiqué l’histoire de France est un descendant d’esclaves dont le père, un général républicain, avait été cassé de son grade par Napoléon en raison de la couleur de sa peau. De même, quand André Malraux y entre, c’est moins le ministre que l’homme qui s’était engagé aux côtés de la République espagnole et de la Résistance. La question de l’engagement pour les valeurs est le premier critère d’entrée au Panthéon.
Quels écrivains renommés ne pourraient pas y entrer à cause de leurs valeurs ?
Céline, par exemple. Ou l’antisémite Edouard Drumont que les réseaux d’extrême-droite voulaient faire entrer sous l’Occupation pendant la Seconde guerre mondiale. […]

Lors de son édification, le Panthéon devait être une église. Pourquoi la Révolution en a-t-elle fait un de ses symboles ?
Le Panthéon est une église dont la construction, décidée par Louis XV pour remercier le ciel d’avoir exaucé un vœu, la guérison du dauphin, a été achevée au début de la Révolution. Elle est laïcisée par la Révolution, qui baptise le lieu Panthéon, en reprenant les références à l’Antiquité. La Restauration rétablit ensuite une croix sur le monument et l’église est consacrée. Louis XVIII prend alors la place que devait occuper Napoléon sur la fresque de la coupole peinte par Gros. En 1830, Louis-Philippe fait reconstruire un fronton mais n’investit pas réellement le lieu. Ce monument est jugé par tous embarrassant : cela vaut-il la peine de provoquer les Républicains sur ce sujet? Jusqu’en 1879, la République est dominée par les monarchistes, qui commandent un grand programme de peintures sur la France éternelle, celle des rois et des saints. C’est alors qu’apparaissent au Panthéon Clovis ou Sainte-Geneviève. Le Panthéon sera à nouveau républicanisé avec l’installation de statues. Tandis que les murs évoquent la France fille aînée de l’Eglise, les sculptures qui évoquent la France républicaine, avec un aspect œcuménique, puisque Robespierre et Mirabeau sont réunis. Le Panthéon est le lieu de cristallisation des deux romans de la France. […]

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