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Mourad Boudjellal, le président du Rugby Club Toulonnais (RCT) s’est confié à La Provence. Il évoque la période dorée de son club, son parcours de président, mais aussi son itinéraire d’homme, lui, “l’enfant issu d’une famille modeste devenu une personnalité fascinante et dérangeante”.

Qu’on le veuille ou non, il y a moins de haine quand c’est un Gaulois pur souche qui emploie certains propos que lorsque c’est moi. Une partie de ces gens-là éprouvent cette haine à mon encontre car je ne suis pas un Gaulois pur souche.

De fait, le RCT ne laisse personne insensible. À l’inverse, il y a des clubs qui ont des constructions solides, dont tout le monde se fout.
Est-ce la grande force de votre club ?
Depuis quelques années, je croise un nombre incalculable de gens – des chauffeurs de taxi, des mecs de cités, des Blacks,… – qui me disent : ’Avant vous, je ne suivais pas le rugby.’ Alors, je me dis que j’ai donné une dimension sociétale au rugby et peut-être un message de victoire. Par rapport à toutes ces personnes-là, j’ai envie de montrer qu’on ne doit pas faire de différence entre ses rêves et ses ambitions. Je suis heureux et fier d’avoir apporté ça, car par les temps qui courent, ce n’est pas quelque chose d’anecdotique. […] Enfant puis ado, je n’aurais jamais imaginé être reconnu dans la rue et pas qu’à Toulon. Je n’aurais jamais pensé non plus susciter autant de haine par moments…
De la haine ?
C’est simple, je reçois des courriers immondes. Allez sur n’importe quel forum de rugby : quand il y a mon nom, les commentaires sont souvent bloqués, car ce serait trop virulent. Il y a des gens qui justifient leur médiocrité en insultant les autres. Il y en a également d’autres, conservateurs voire davantage, qui s’expriment et qui auraient été habillés par Hugo Boss pendant la Seconde Guerre. Pour eux, quand vous n’avez pas trop de voyelles dans votre nom et que vous êtes dans le Sud de la France, vous êtes louche. […]

Le rugby conservateur est-il à l’image de notre pays ?
Je pense que la France a du mal à comprendre que le monde a rétréci. Le rugby davantage encore. Du coup, on ne peut plus parler de culture locale ou nationale, mais mondiale. C’est la raison pour laquelle, les différences de naissance au Km2 ne signifient absolument rien.

Dès lors, tous ces gens, qui s’attachent à leur lopin de m2 où ils sont nés, sont des crétins, car aujourd’hui, on est sur un monde unique.

Alors, c’est vrai, le rugby est à leur image : on défend sa chapelle. […] Vous évoquiez ceux qui défendent leur lopin de terre coûte que coûte. Comment percevez-vous ce type de discours, vous, l’enfant d’immigrés ?
Moi, ce qui me choque, c’est qu’on compte le nombre de Français dans une équipe. Le rugby est le seul sport où c’est le cas. D’ailleurs, après le nombre de Français, on pourrait passer au nombre de Blancs. On est dans la même logique. Et ensuite, on mettra des quotas sur les Noirs, puis sur les Juifs. À partir du moment où il y a le mot ’quota’, je trouve que c’est puant, car pour moi, même dans le contexte sportif, les mots ont un sens. L’Histoire leur a donné une signification et il faut faire attention avec ça.
La Provence

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(Merci à Lilib)

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