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Dans les cités, les vendeurs de drogue chouchoutent leur clientèle. Certains vont jusqu’à distribuer des cartes de fidélité

Yohann, 31 ans, dont quinze de consommation de cannabis au compteur, n’en revient toujours pas. Après l’achat de trois barrettes de shit, un jeune dealer lui tend alors une petite carte. “J’ai carrément halluciné. On m’avait déjà offert des cigarettes, des briquets ou des feuilles pour rouler, mais il s’agissait d’une carte de fidélité. D’un côté, il y avait une sorte de grille tarifaire, avec les offres promotionnelles, de l’autre des cases vides prévues pour valider mes prochains achats. J’ai eu l’impression d’être à la pizzeria du coin”, se remémore le trentenaire. Sauf qu’il ne s’agissait évidemment pas d’une pizzeria ni de la supérette du coin, mais bien du supermarché de la drogue de Val-Plan.
Cette fameuse carte est des plus informatives. On peut y lire les horaires de vente (de 11 heures à minuit) et le détail des offres, dont la “formule confort” : pour 50 euros de shit, le client reçoit un paquet de Marlboro, un paquet de feuilles OCB, et un briquet en bonus.
On y distingue aussi des formules de politesse qui, si elles sont maladroitement formulées, étonnent de la part de petits caïds : “Nous attendons de vous accueillir avec plaisir au centre du quartier, merci de votre fidélité”. “Ce truc, c’est très récent, mais ça a vite circulé sur internet et ça a fait un buzz de fou. Du coup, tout le monde vient au quartier pour voir ça de près. Ça amène de la clientèle en plus et ça fait parler de nous. Il n’y a personne d’autre qui propose ça, même si on ne le fait pas systématiquement”, nous a expliqué hier matin, à Val-Plan, un proche du réseau.
Les habitants de cet ensemble de HLM, premiers témoins du trafic quotidien, sont, eux, abasourdis. ” Ils n’ont qu’à faire payer par carte bleue tant qu’ils y sont, ou ouvrir un site d’achat en ligne. Ça ne me fait pas rire du tout, ça prouve bien qu’ici, tout est permis “, lâche une jeune mère de famille. Si elle ne prête évidemment pas à rire, cette carte de fidélité de la drogue illustre la professionnalisation des réseaux qui, en plus de proposer cadeaux et ristournes, s’organisent sur le terrain comme de véritables commerces.
La Provence
 

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