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Selon Marion Van San, chercheuse au RISBO, les musulmans ne se radicalisent pas à cause de la pauvreté, du racisme ou d’une mauvaise intégration. Voici ce qu’elle écrit.
Depuis que nous avons appris que des jeunes quittaient la Belgique, mais aussi d’autres pays européens, pour rejoindre le conflit armé en Syrie, un débat violent a éclaté. Le débat mené en Belgique est imprégné d’idées reçues qui empêchent toute analyse appropriée du phénomène.

Selon ces idées toute faites, ces jeunes gens partiraient pour la Syrie parce qu’ils sont victimes d’une société qui ne les acceptent pas et qui ne leur offre pas d’opportunités. Ce point de vue, soutenu par Rik Coolsaet dans une récente édition du journal, n’est cependant pas étayé par les données empiriques.

Que ce soit dans les recherches sur l’extrémisme islamique, ou même dans les recherches sur le terrorisme en général, la conclusion est toujours la même : les gens concernés ne sont pas toujours issus d’un niveau social bas, ils ne sont pas marginalisés ou frustrés, et ne présentent pas de troubles psychiatriques.
Les familles dont sont issus les jeunes Belges partis ne sont pas toutes de classe inférieure, leurs enfants ne sont ni sous-qualifiés, ni frustrés. Concernant les discriminations dont ils se disent victimes, on n’a généralement que peu de preuve empirique.

Ces dernières années, de nombreuses recherches internationales ont eu lieu sur le radicalisme et l’extrémisme. Ce qu’elles montrent est que les jeunes hommes et femmes qui se radicalisent, et qui cèdent parfois à l’extrémisme, sont souvent issus de familles de la classe moyenne. Il y a aussi quelques cas de jeunes issus de la classe supérieure.

N’oublions pas que les pirates de l’air des attaques du 11 septembre venaient de familles riches. Un autre point à noter, le faible statut social et le manque d’opportunité sont le lot de la grande majorité des gens, mais seuls quelques uns d’entre eux deviennent extrémistes.
Si le manque d’opportunité devait conduire à l’extrémisme, les pays les plus pauvres dans le monde devraient fournir le plus d’extrémistes. Or nous savons que ce n’est pas le cas. N’y a-t-il aucun démuni parmi ceux qui partent ? Bien sûr que si, c’est de ceux là que Coolsaet parle. Mais rappelons-le, le groupe parti se battre en Syrie est beaucoup plus divers qu’il ne le suggère.
Un autre stéréotype habituel dans le débat en Belgique est que, malgré les recherches qui réfutent cela, la radicalisation serait le résultat d’une intégration qui a échoué. Les chercheurs appellent ce phénomène le paradoxe de l’intégration, il sert de terreau fertile à la radicalisation.
Ce paradoxe signifie que les enfants et petits-enfants d’immigrés, qui sont nés et ont grandi ici, attachent une grande importance à la société dans laquelle ils vivent. Ils veulent être acceptés socialement et font tout ce qu’ils peuvent pour s’intégrer. Le résultat est qu’ils ont des attentes sociales plus élevées que les autres et sont plus sensibles aux exclusions et aux (prétendues) discriminations.
Les expériences négatives peuvent les détourner de la société et les conduire à chercher refuge dans une recherche d’identité dangereuse.

Je crois pouvoir dire que plus les jeunes sont intégrés, plus il y a risque de radicalisation.

Cette thèse est appuyée par de nombreux éléments. Souvent les jeunes radicalisés étaient très occidentalisés avant leur radicalisation. Ils buvaient de l’alcool et consommait souvent de la drogue.

Par la suite, ils ont commencé à s’intéresser de plus en plus à la religion, ils se sont convertis à l’Islam pour finir par se radicaliser en très peu de temps. La plupart avait terminé leurs études ou avaient un travail et des amis issus de groupes ethniques différents.


Ce qui frappe, dans le débat de ces semaines passées, c’est que non seulement des explications standard sont données pour expliquer le départ de tant de jeunes, mais en plus on y apporte des solutions standard. des solutions qui sont en fait destinées à des problèmes divers.
Il est devenu trop risqué de persévérer avec de telles solutions maintenant que le problème est devenu une question de vie ou de mort. Le fait d’avoir affaire à un groupe très divers montre immédiatement la difficulté pour trouver une solution convenable.
Nous savons que lutter contre la pauvreté ne suffit pas à combattre contre le radicalisme et l’extrémisme. Il ne faut pas non plus mettre trop d’espoir dans les propositions de lutte contre le chômage des jeunes.
Je ne fais pas ici d’appel à changer fondamentalement les politiques actuelles de lutte contre la pauvreté, ni à arrêter de lutter contre le racisme sur le lieu de travail ou sur le marché de l’emploi. Mais nous devrions pas entretenir l’illusion que ces mesures vont freiner le radicalisme et l’extrémisme. Pour vraiment comprendre le groupe auquel nous avons affaire, nous avons besoin d’une profonde compréhension de qui sont ces jeunes et ces familles dont ils viennent, nous pourrons ainsi se défaire petit à petit des idées reçues qui dominent trop souvent le débat. Tout le reste n’est que perte de temps et d’énergie.
(*) Marion van San est chercheuse au RISBO, un institut de recherche indépendant, actif dans le domaine de l’enseignement et affilié à la Faculté de sciences sociales de l’Université Erasmus de Rotterdam. Depuis 2009, elle a dirigé des études ethnographiques sur les familles des jeunes radicalisés.
(Traduit en français par Fdesouche à l’aide de la traduction en anglais de 10news.dk)
De Standaard

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