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Coup de filet spectaculaire au Brésil : Ezequiel Antônio Castanha, chef d’un cartel de défrichage illégal, a été arrêté le 24 février 2015. Accusé d’être responsable de 20% de la déforestation illégale dans l’État du Pará, Castanha encourt une lourde peine de prison. Cette arrestation pourrait bien mettre un terme à l’apparente impunité dont jouissent les grileiros, ce qui constitue une bonne nouvelle pour l’IBAMA (Institut brésilien de l’environnement et des ressources naturelles renouvelables).

Les chiffres dévoilés par l’IBAMA, l’Institut brésilien de l’environnement et des ressources naturelles renouvelables, donnent le tournis : Ezequiel Antônio Castanha, chef d’un cartel de défrichage illégal, trafic de bois et de revente illégale de terres publiques, serait à l’origine de plus de 540 millions de réais de dommages environnementaux, soit 170 millions d’euros.

Selon les informations de l’institut, il serait donc responsable de 20% de la déforestation autour de l’autoroute BR-163, dans l’Etat du Pará, là où se concentrent les plus grandes zones de déforestation illégale d’Amazonie.

Le régime de terreur des “grileiros”

Les ʺgrileirosʺ, nom donné à ces défricheurs clandestins, sont nombreux en Amazonie. L’arrestation spectaculaire d’Ezequiel Antônio Castanha et de quinze membres de son cartel, le 21 février, a mis en lumière leur mode opératoire.

ʺIl a créé un régime de terreur dans la région”, explique Luciano Evaristo, directeur de la Protection environnementale à l’IBAMA. “Les criminels prenaient possession des terres par les armes. Pour défricher, ils faisaient appel à une main d’œuvre locale qui travaillait dans des conditions proches de l’esclavageʺ, précise-t-il. Principal employeur de la région, Castanha imposait en outre la loi du silence aux habitants, ce qui a rendu l’enquête laborieuse.

L’organisation de Castanha opérait autour de l’autoroute BR-163, entre les villes de Novo Progresso, Itaituba et Altamira, en plein milieu de la forêt amazonienne. Le bois était revendu de façon illégale à des scieries de la région. Une étude menée par Greenpeace en mai 2014 avait d’ailleurs révélé l’ampleur du trafic de bois en Amazonie, opéré par un vaste réseau d’organisations criminelles comme celle d’Ezequiel Antônio Castanha.

Selon l’Ibama, 500 000 mètres cubes de bois scié auraient été certifiés via de faux papiers en 2013 dans les seuls États du Maranhão et du Pará. Ces certifications permettent ensuite d’exporter le bois, notamment vers la France. L’organisation de Castanha louait ou revendait également les terres défrichées à des investisseurs et exploitants, à des tarifs atteignant parfois 20 millions de réais (6,2 millions d’euros).

C’est en 2006 que l’Ibama a repéré pour la première fois les zones déforestées par l’organisation de Castanha, grâce à son système de surveillance par satellite. Visé par de nombreuses amendes pour ʺcrimes environnementauxʺ, le chef du cartel poursuivait cependant impunément son commerce. Jusqu’à ce mois de février.

ʺLes amendes ou les embargos sur les terres publiques envahies ne dissuadent pas les ‘grileiros’, fait remarquer Paulo Barreto, de l’institut Imazon, qui dénonce l’impunité dont bénéficient les criminels de l’environnement en Amazonie. Ce territoire gigantesque est compliqué à surveiller efficacement. Les grileiros ne paient pas leurs amendes et se débrouillent pour détourner les embargosʺ.

Jusqu’à 50 ans de prison pour le défricheur en série

Pour mettre à genou le cartel, l’Ibama a travaillé conjointement avec la Police fédérale et l’organisme de collecte des impôts. ʺEn plus des crimes environnementaux, qui ne donnent lieu qu’à des peines de prison légères, nous avons émis un mandat d’arrêt pour invasion de terres publiques, trafic illégal de bois, blanchiment d’argent et formation de cartelʺ, précise le directeur de l’IBAMA.

Ces crimes pourraient valoir au chef du cartel entre 46 et 50 ans de prison. L’opération ʺCastanheiraʺ a déjà permis d’arrêter huit membres de l’organisation depuis septembre.

ʺIl est très rare qu’un ‘grileiro’ aille en prison. C’est une très bonne nouvelle pour le combat contre la déforestation“, se félicite Paulo Barreto. “Il faut maintenant répéter ce mode d’investigation à grande échelleʺ.

ʺNous préparons une autre opération contre une organisation similaire dans l’État du Paráʺ, révèle déjà le directeur de l’Ibama. Pour Paulo Barreto, il faut également améliorer les méthodes de surveillance de la déforestation, et actionner les autres leviers légaux à disposition contre les criminels de l’environnement, comme confisquer systématiquement les terres publiques détournées.

Novethic

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