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Les inégalités se sont encore accrues aux Etats-Unis, selon une étude publiée jeudi 4 septembre par la Réserve Fédérale (Fed). Les revenus des 10 % les plus riches ont augmenté de 10 % entre 2010 et 2013 pour s’inscrire à 397 500 dollars par an (307 000 euros). Dans le même temps, ceux des 40 % les moins aisés, ajustés de l’inflation, ont décliné, indique le rapport publié tous les trois ans.

Pour les vingt premiers centiles situés au bas de l’échelle, la chute atteint 8 % à 15 200 dollars annuels. Si le revenu moyen global a augmenté de 4 % au cours des trois dernières années, le revenu médian (c’est-à-dire le revenu qui divise la population en deux parties égales : l’une gagnant plus, l’autre moins), lui a chuté de 5 %. Une tendance qui « correspond avec un accroissement de la concentration des revenus durant cette période », indique la Fed.

Ainsi, les 3 % les plus riches américains concentrent 30,5 % du revenu total en 2013 contre 27,7 % en 2010, tandis que la part des 90 % les moins riches, elle, a reculé. Par ailleurs, cette catégorie des 3 % les plus riches détient 54,4 % de la richesse globale (revenu plus patrimoine) contre 44,8 % en 1989. A l’autre bout de l’échelle, les 90 % les moins riches ont vu leur part tomber à 24,7 % contre 33,2 % en 1989.

Reprise à deux vitesses

Derrière ces chiffres se dessine une reprise économique à deux vitesses. Ceux disposant d’un portefeuille en Bourse ou d’un patrimoine immobilier ont bénéficié d’un effet richesse substantiel au cours des trois dernières années. L’indice Standard & Poor’s 500 a ainsi grimpé de 47 % durant cette période. Celui qui mesure l’évolution de l’immobilier, le S&P/Case Shiller Index, lui, a fait un bond de 13,4 %.

Pour ceux qui ne disposent ni de l’un ni de l’autre, la notion de reprise a été beaucoup plus évasive dans un contexte de stagnation des salaires et de fragilité du marché de l’emploi. Car si le taux de chômage n’a cessé de baisser depuis 2010, il n’offre qu’une vision partielle du marché du travail dans la mesure où de plus en plus d’Américains renoncent à rechercher un emploi.

En novembre 2013, lors de son audition au Sénat, Janet Yellen, alors qu’elle s’apprêtait à être nommée à la tête de la Fed, avait qualifié l’accroissement des inégalités comme « un problème très profond », indiquant néanmoins que beaucoup de facteurs sous jacents du phénomène échappaient au domaine d’action de la Banque centrale américaine.

Il faut néanmoins noter qu’une bonne partie de l’effet richesse qui a profité aux plus aisés a été alimentée par les colossales injections de liquidités décidées par la Fed depuis trois ans pour relancer l’économie. Dans un contexte de taux d’intérêts proches de zéro, cet argent est venu s’investir principalement dans les actions et l’immobilier.

Origines des ménages

Lorsqu’on regarde l’origine des ménages, les inégalités sont encore plus criantes. Le revenu moyen de la population blanche, propriétaire et diplômée a augmenté entre 2010 et 2013, tandis que celui des noirs, des hispaniques, des locataires et des sans diplôme a baissé dans le même temps. De la même façon, le revenu médian des noirs et des hispaniques a chuté 9 % sur la période, quand il ne baissait que de 1 % pour les blancs.

Par ailleurs, le rapport indique que le taux de propriétaires de leur logement parmi les ménages américains est tombé à 65,2 %. Il s’agit du plus bas niveau constaté depuis 1995. Quand aux familles propriétaires de leurs entreprises, le pourcentage est tombé à 11,7 %. Du jamais vu depuis 25 ans.

La thèse de l’économiste français Thomas Piketty développée dans son livre Le capital au XXIe siècle sur l’accroissement des inégalités, a beau avoir été contestée par une partie de la doxa libérale, les chiffres semblent têtus.

Le Monde

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