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Un peu plus d’un an après avoir déclaré faillite, la capitale de l’automobile est de retour en cour fédérale pour défendre son plan de restructuration. Même si elle réussit à faire approuver sa feuille de route, la ville aura une rude côte à remonter. Sur le terrain, toutefois, la revitalisation est bel et bien amorcée.

La partie n’est pas gagnée. L’administrateur Kevyn Orr a beau avoir obtenu l’appui des syndicats et des régimes de retraite municipaux, des assureurs obligataires s’opposent farouchement à son plan. Ils continuent à exiger que la fabuleuse collection du Detroit Institute of Arts (DIA) soit mise à contribution pour réduire leurs pertes.

Le tribunal aura à se prononcer sur la valeur juridique de leurs arguments. Ils ne seraient pas sans fondement, pense le Wall Street Journal. La loi américaine sur les faillites stipule qu’un plan de restructuration municipal doit être juste et équitable envers les créanciers. Or, celui de Detroit permettrait à certains créanciers non garantis (les employés et retraités de la Ville) de récupérer davantage d’argent que d’autres (les assureurs hypothécaires).

Sur le principe, toutefois, l’idée de saccager les collections du DIA est une hérésie, tant du point de vue muséal que dans le contexte de relance actuel. D’autant que ce musée des beaux-arts, l’un des plus importants aux États-Unis, est situé dans une zone en pleine revitalisation. Et ce n’est pas la seule.

Les collègues Anabelle Nicoud et Edouard Plante-Fréchette l’ont bien montré dans La Presse samedi. Nous l’avons aussi constaté récemment. La mauvaise herbe n’est pas la seule à prospérer dans ce paysage fissuré. Des entreprises et des projets de toute nature émergent dans divers quartiers. Des jeunes adultes, artistes mais pas seulement, débarquent d’un peu partout, attirés par la possibilité de faire leur marque dans cette ville à réinventer.

Pour l’administration municipale, le casse-tête urbanistique est loin d’être terminé. Même délesté d’une partie de ses dettes, Detroit demeure aux prises avec un taux de criminalité alarmant, des infrastructures et des services exsangues, ainsi qu’un potentiel de taxation nettement insuffisant par rapport à ses besoins.

Pour que l’embellie visible dans les quartiers centraux s’étende au reste du territoire, il faudra y ramener un sentiment de sécurité (à commencer par l’éclairage des rues, où plus d’un lampadaire sur trois ne fonctionne pas), mettre en place un système de transports en commun digne de ce nom, attirer des emplois. Combien de temps faudra-t-il ? Impossible à dire, mais pas impossible à réaliser.

Rappelez-vous le New York du milieu des années 70, rongé par la criminalité et au bord de la faillite. Oui, cela demande un effort. La ville, qui avait perdu 1 million d’habitants et a mis 20 ans à les retrouver, est aujourd’hui méconnaissable. Detroit pourrait nous réserver des surprises.

LA PRESSE

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