Fdesouche

Loïc Trabuc explique dans une tribune du Monde pourquoi il démissionne de l’Education nationale. Extraits.

Je voudrais une école qui rompe définitivement avec l’école de la IIIe République, avec l’école de Jules Ferry. Rappelons-le, celle-ci avait pour mission de forger un sentiment national à partir d’une prétendue culture commune, largement fantasmée, afin de faire de ses élèves des soldat-citoyens aptes à reconnaître les intérêts supérieurs de la nation, c’est-à-dire à se sacrifier pour elle.

Ma thèse est que cette institution que l’on se plaît à appeler l’école de la République est totalement anachronique et qu’elle est demeurée, dans l’esprit, ce qu’elle était déjà il y a plus d’un siècle, alors même que le rôle que lui assigne la société a radicalement changé.
Considérant que pour une large part l’école de la République reste fondée sur les mêmes bases qui étaient les siennes quand il s’agissait, sous la IIIe République, de former des soldats-citoyens prêts à se sacrifier pour la patrie, et rappelant cette évidence que c’est une finalité depuis longtemps dépassée, je veux donner (sans prétendre toujours à l’originalité) quelques aperçus de ce que pourrait être une école dans laquelle je me sentirais à ma place en tant qu’enseignant. […] L’école dans laquelle je pourrais enseigner, ce ne serait peut-être pas l’école de la République, mais la vraie école des Lumières, c’est-à-dire l’école de l’individu. Une école qui mettrait au centre de son action la sensibilité de l’élève. […]

Cette école ne sanctionnerait pas les élèves, elle les laisserait libres d’agir. La sanction dans l’école de la République n’est pas autre chose que les prémices de la discipline militaire dont la raison d’être était de rendre possible le sacrifice du soldat-citoyen pour la patrie.

On se récriera contre cette volonté de rupture. On me parlera des valeurs de la République, la grande fierté de notre école. Celles-ci ne s’imposeraient-elles pas d’elles-mêmes dans une école qui se fixerait pour mission de faire surgir des différences et de confronter des sensibilités ? Des élèves amenés par l’école à découvrir leur sensibilité propre, à se laisser porter vers leurs aspirations, leurs désirs, à construire leur propre vision du monde, seraient tolérants par l’absence même de normes, une tolérance qu’ils dirigeraient autant vers eux-mêmes que vers les autres. D’ailleurs, en dehors de l’école les élèves sont déjà habitués à exprimer leur sensibilité, à découvrir et à accepter celle des autres. De ce point de vue, facebook fait aujourd’hui bien mieux que l’école pour faire de la tolérance un réflexe naturel. Mais c’est un autre débat. L’école, elle, a un rôle fondamental à jouer pour aider ces sensibilités à s’exprimer. Car c’est vrai, l’échec de l’école se lit aussi sur facebook. […] Le Monde (Merci à Mgr Aramis)

Fdesouche sur les réseaux sociaux