Fdesouche

Bernard-Henri Lévy est revenu tout ébahi de la soirée de gala donnée par l’ambassadeur de France à Copenhague début février. Le « pays de Kierkegaard », comme il nomme prosaïquement le Danemark, est aussi le « pays du roi Christian », qui refusa de faire porter l’étoile jaune aux Juifs pendant la seconde guerre mondiale, mais également celui « des aviateurs de la guerre de Libye » venus prêter main forte aux troupes de l’Organisation du traité de l’Atlantique nord (OTAN) en 2011. Un Etat symbole de la « réconciliation de la liberté et de l’égalité ».

par Benoît Bréville.

Hélas, un nuage assombrit le ciel de cette merveilleuse contrée : depuis le mois de novembre,

les Danois s’opposent à ce que la banque américaine Goldman Sachs, l’une des principales responsables de la crise des subprime en 2008, entre au capital de la compagnie nationale d’énergie, Dong Energy.

Malgré une pétition ayant recueilli plus de deux cent mille signatures (soit un habitant sur trente) et de multiples rassemblements, le projet a été approuvé par le Parlement le 30 janvier, entraînant la démission des six ministres socialistes qui formaient l’aile gauche de la coalition gouvernementale.

L’établissement new-yorkais contrôlera donc 19 % des parts de la société d’Etat et disposera d’un droit de veto sur des décisions stratégiques.

« On a beau dire et répéter qu’il s’agit d’une prise de participation minoritaire. On a beau rappeler, et rappeler encore, que Goldman Sachs était le mieux-disant en termes de savoir-faire autant que d’investissement. Rien n’y fait », déplore « BHL »,

qui ne voit dans le mouvement de contestation qu’un « déferlement d’antiaméricanisme » teinté d’une « passion rouge-brune ».

S’opposer aux desiderata de Goldman Sachs témoignerait donc d’un antisémitisme latent…

Rien à voir avec l’Ukraine, où le philosophe français séjournait quelques jours avant ses agapes danoises. « Je n’ai pas vu de néonazis, je n’ai pas entendu d’antisémites [parmi les protestataires de la place Maidan] », affirmait-il à un journaliste d’Euronews (9 février 2014). « J’ai entendu au contraire un mouvement incroyablement mûr, incroyablement déterminé et très profondément libéral. » La présence en son sein de membres du parti d’extrême droite Svoboda — dont le drapeau flottait pourtant sous ses yeux durant son allocution sur place — et de son concurrent encore plus droitier Praviy Sektor (lire « En Ukraine, les ultras du nationalisme ») lui a donc totalement échappé.

Une cécité qui se comprend : à Kiev, les manifestants ne luttent pas contre une grande banque d’affaires, mais pour « revivifier le rêve européen ».

 
monde-diplomatique.fr

Fdesouche sur les réseaux sociaux