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Elisabeth Lévy

Autant l’avouer, je me suis plutôt amusée. J’espère que ce n’est pas trop grave. De toute façon, impossible de le cacher. Dans le public entassé au théâtre de la Main d’or pour la première représentation post-interdiction du nouveau spectacle de Dieudonné, beaucoup guettaient attentivement mes réactions – sans agressivité d’ailleurs.
[…] Je ferais bien durer le suspense en narrant par le menu le sketch où deux mariés pour tous se voient proposer toutes sortes d’enfants (tous âges et tous usages) par un maquignon africain qui conclut en leur disant : « Ici, on n’est pas homophobes, non pas du tout, on est homovores ! » C’est trash et réjouissant, sans fiel ni ressentiment. Je sais, ce n’est pas ça qui vous intéresse. […] Bien sûr, Dieudonné joue avec la limite en tournant autour du sujet dont il ne parlera plus sur le mode du gamin qui tourne autour du pot de confiture. Il en remet une petite louche sur Patrick Cohen, « neurologue l’après-midi » – il avait parlé de son cerveau malade. Il frôle la limite quand il campe le patron de la Licra, Alain Jakubowicz, exhortant les spectateurs à quitter le théâtre et rappelant au comique qu’il est sous « étroite surveillance ». […] Le couplet sur les sociologues et les journalistes étudiant le dieudonniste et concluant qu’il est fou et même nazi est assez réjouissant. Mais j’ai eu beau tendre l’oreille, humer l’ambiance, traquer le double-sens, je n’ai pas senti de haine derrière les rires, plutôt le besoin de se laver de l’infâmant soupçon. Quand il dit « je ne suis pas antisémite », le comique abandonne le ton farce. Tous les spectateurs qui sont venus nous voir voulaient vraiment nous convaincre qu’ils ne le sont pas. Ce qu’ils aiment, c’est la provocation, la transgression maximale. Le mec qui ne cède pas. […] Causeur

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