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S’il y a un pays où la chute de l’or suscite bien des réactions, c’est l’Inde. Le métal jaune demeure le placement de prédilection des Indiens, ce qui fait du pays le plus gros acheteur de la planète. Compte tenu de la place de l’or dans les portefeuilles – mais aussi dans la psychologie – des Indiens, un repli brutal des cours entraîne des conséquences variées et parfois inattendues.

La première d’entre elles, bien sûr, c’est un appauvrissement des Indiens qui ont placé tout ou partie de leur épargne en or. Globalement, le broker CLSA estime que les ménages indiens possèdent 20.000 tonnes d’or valant 845 milliards d’euros (en décembre dernier), ce qui correspondrait à 18 % de leurs avoirs. La baisse des cours d’environ 20 % observée depuis le dernier pic se traduirait donc par un effet d’appauvrissement de l’ordre de 4 % de leurs actifs.

Les familles voient dans la baisse des cours l’occasion d’achats à bon compte. Les prêteurs sur gages s’inquiètent.

Leurs réactions risquent cependant d’être très différentes selon que l’on ait affaire à des épargnants traditionnels qui placent leurs économies plutôt modestes en or (souvent sous forme de bijoux) faute d’autre possibilité et qui en achètent quoi qu’il arrive pour les mariages et les fêtes religieuses ; ou à des investisseurs qui voient dans le métal jaune un instrument de spéculation et de couverture contre l’inflation.

Ces derniers, pris à revers par le retournement du marché, risquent de s’en détourner pour un moment. Pour les premiers, en revanche, la baisse des cours pourrait avoir l’effet strictement inverse.

Afflux d’achats pour la saison des mariages

Comme le souligne l’agence de notation Crisil (groupe Standard & Poor’s), « durant les quatre dernières années, les prix de l’or domestique ont augmenté de 24 % par an [ce qui a] affecté la consommation, qui n’a crû que de 2,5 % par an ». L’agence estime donc que, si les prix de l’or se stabilisent à des niveaux bas, la demande pourrait accélérer.

C’est d’ailleurs ce que l’on observe ces tout derniers jours, avec un afflux d’achats qui suscite des problèmes de disponibilité sur le marché physique et, en conséquence, une envolée des primes à payer pour le métal par rapport aux cours de référence du marché londonien. Pas étonnant, note un responsable de l’Association des bijoutiers de Bombay, « les gens font des stocks en vue des mariages »

La chute des cours sème par ailleurs une certaine panique dans une activité très répandue en Inde : les prêts gagés sur l’or. Dans la mesure où ce dernier constitue souvent le principal ou le seul actif financier des ménages, il est courant de s’en servir comme garantie pour obtenir un crédit. Selon CLSA, cette activité est pratiquée à 70 % par des prêteurs sur gages et autres usuriers, 20 % par les banques classiques et 10 % par des établissements financiers spécialisés.

Or, pour tous ces prêteurs, la chute des cours fait que, dans bien des cas, la valeur du métal ou des bijoux mis en dépôt ne couvre plus le prêt accordé. Certaines firmes spécialisées, qui ont connu une croissance très rapide ces dernières années en prêtant jusqu’à 90 % de la valeur de l’or déposé, se trouvent confrontées à une flambée des défauts de paiement.

Une situation que la banque centrale, qui a récemment resserré les normes de fonctionnement de ces établissements et des crédits bancaires dont ils bénéficient, suit de très près.

Les Échos

(Merci à Tilak)

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