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Eric Deschavanne, professeur de philosophie, analyse la quête d’identité des jeunes et la disparition d’une certaine culture qui leur était spécifique. Il ne croit pas au «retour du religieux».

La fascination pour les marges subsiste, ce qui explique l’influence de la culture des jeunes des quartiers – influence pour ainsi dire proportionnelle à leur infériorité sociale. Cela permet sans doute aussi d’expliquer la fascination qu’exerce l’islam sur certains jeunes Français dit “de souche”.
Contrairement à leurs aînés de la génération 68, les jeunes d’aujourd’hui semblent manquer d’un ciment social et culturel fort. Comment cela s’explique t-il ?
Les années 60, en effet, ont marqué une rupture dans la relation jeune/adulte ainsi que dans le mode de socialisation de la jeunesse. A vrai dire, c’est même à cette époque que s’est constituée “la jeunesse”, au sens contemporain du terme – une classe d’âge relativement homogène, définie par le statut scolaire ou étudiant, et pourvue d’une identité culturelle spécifique. Les années 60 correspondent à la première vague de démocratisation de l’enseignement secondaire et supérieur (auparavant, la majorité des jeunes étaient en apprentissage ou dans la vie active dès 14 ans) ainsi qu’à l’essor de la culture jeune, qui devint alors un marqueur identitaire lié à l’âge et à la génération.
Plus en profondeur et sur le long terme, nous assistons à une mutation dans le «devenir adulte». Le mode de socialisation traditionnel était caractérisé par la transmission sans altération d’une identité sociale. On était paysan et catholique de père en fils, recevant en héritage un patrimoine, un statut, des croyances et des mœurs. La démocratisation de l’enseignement secondaire et supérieur (l’invention de l’adolescence) associée aux mutations d’une économie moderne marquée par la “destruction créatrice” (fin des paysans, puis, avec la révolution technologique et la mondialisation, déclin de la classe ouvrière) ont bouleversé les conditions de l’entrée dans la vie.
L’impératif pour devenir adulte n’est plus de s’identifier à ses parents, ni même, plus largement, aux modèles proposés par les adultes en général : tout modèle susceptible de servir de support d’identification apparaît précaire ; tout adulte est un has been en puissance. […] Atlantico

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