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Le 6 novembre dernier Jean-Marc Ayrault a rendu public les conclusions que le gouvernement a tiré du rapport remis la veille par Louis Gallois à propos de la compétitivité industrielle du pays. Même si l’allègement du coût du travail de 20 milliards d’euros promis par le gouvernement ne devrait pas avoir d’effets négatifs sur la consommation en 2013, il participe à la course au moins disant salarial qui aggrave la crise de la zone euro.

Les entreprises vont-elles pour autant se remettre tout d’un coup à investir et embaucher en France ? Il y a lieu d’en douter malgré ce qu’affirme Jean-Marc Ayrault, qui promet, grâce au CICE, 300 000 emplois de plus à l’horizon 2017. Dans le contexte très déprimé de l’économie française, encore aggravé l’an prochain par la forte austérité budgétaire déjà décidée par ailleurs, il y a de fortes chances que les entreprises utilisent plutôt ces profits supplémentaires soit pour investir hors de France, dans les pays émergents notamment, soit pour verser encore plus de dividendes à leurs actionnaires, majoritairement étrangers en ce qui concerne les grands groupes.

La principale mesure annoncée par le premier ministre consiste en un crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) qui devrait être accordé aux entreprises sous la forme d’une baisse de l’impôt sur les sociétés qu’elles auraient eu à verser au titre de l’année 2013 et des suivantes. Celles qui ne réalisent pas de bénéfices percevront un chèque de l’Etat. Cet allègement sera progressif : 10 milliards d’euros au titre de 2013 et 5 milliards de plus les deux années suivantes, soit dans 3 ans, un total de 20 milliards d’euros, 1 % du produit intérieur brut (PIB). Ce crédit d’impôt sera calculé en proportion de la masse salariale versée par les entreprises aux salariés qui perçoivent entre 1 et 2,5 fois le Smic, soit 3500 euros bruts mensuels environ actuellement, selon des modalités qui restent à préciser. 85 % des salariés seraient ainsi concernés. La rémunération totale des salariés dans l’économie française a représenté 1 067 milliards d’euros en 2011. 20 milliards d’euros représentent donc a priori un allègement inférieur à 2 % de ce coût total. Le gouvernement affirme cependant que le coût du travail des personnes concernées baisserait de 6 %, un calcul qui reste mystérieux pour l’instant…

Hausse de la TVA

Pour compenser cette perte pour le budget de l’Etat, le taux normal de TVA serait porté de 19,6 % actuellement à 20 % en janvier 2014 ce qui rapporterait de 2 à 2,5 milliards d’euros. Le taux intermédiaire de 7 % (qui s’applique notamment à la restauration et au bâtiment) serait quant à lui porté à 10 % pour des rentrées estimées entre 4 et 4,5 milliards d’euros. Tandis que le taux de TVA réduit (principalement l’alimentation) serait ramené de 5,5 à 5 %. L’ensemble rapportant de l’ordre de 6 milliards d’euros. 4 milliards devraient encore être trouvés à travers d’autres taxes et notamment des taxes environnementales, tandis que ce cadeau aux entreprises devrait être financé également par une baisse supplémentaire de 10 milliards d’euros des dépenses publiques.

La technique du crédit d’impôt permet que les entreprises anticipent 10 milliards de bénéfices supplémentaires l’an prochain, tandis que les pertes pour les comptes publics ne seront constatées qu’en 2014. Ce qui limite l’effet récessif à court terme de la mesure, objection soulevée à juste titre contre le transfert de cotisations sociales vers la CSG ou la TVA que souhaitait Louis Gallois.

Des créations d’emploi incertaines

Les entreprises vont-elles pour autant se remettre tout d’un coup à investir et embaucher en France ? Il y a lieu d’en douter malgré ce qu’affirme Jean-Marc Ayrault, qui promet, grâce au CICE, 300 000 emplois de plus à l’horizon 2017. Dans le contexte très déprimé de l’économie française, encore aggravé l’an prochain par la forte austérité budgétaire déjà décidée par ailleurs, il y a de fortes chances que les entreprises utilisent plutôt ces profits supplémentaires soit pour investir hors de France, dans les pays émergents notamment, soit pour verser encore plus de dividendes à leurs actionnaires, majoritairement étrangers en ce qui concerne les grands groupes.

Ce type de mesures engage surtout la France dans la course au moins disant salarial qui bat déjà son plein en Europe, en particulier dans les pays en crise. Comme tous nos voisins pratiquent déjà ce genre de politique, la pression est effectivement forte pour que la France suive à son tour le mouvement, au risque sinon que son déficit extérieur déjà très important s’accroisse encore et que disparaisse le peu d’industrie qui lui reste. Mais globalement, cette spirale de baisse des salaires ne peut guère que prolonger et aggraver la crise européenne en nourrissant la dépression qui entraîne déjà la zone euro vers le fond.

Alternatives Economiques

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