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La déception de Colm Tóibín, journaliste et romancier irlandais, sur l’Union européenne.

L’Union européenne paraissait disposée à s’octroyer de plus en plus de pouvoir. Elle donnait l’impression de ne vouloir ni se réformer ni remettre en question ses propres procédures. En recourant aux mêmes méthodes que les diplomates, elle a créé un étrange ennemi appelé peuple.
L’Union européenne est comme un rêve étrange que nous avons fait ; il s’agissait de façonner et de ciseler un ensemble de valeurs politiques pour l’insérer dans un système complexe qui devait placer les valeurs humaines, la richesse culturelle et l’idée d’égalité au centre même de nos préoccupations. […] En Europe, il y a l’idée d’une culture humaniste commune à tous, issue de la liberté d’écrire et de penser à notre guise, d’exprimer des idées neuves et de créer des images neuves. […] Sous la pression, nos loyautés vont aux Etats-nations, alors même que nos banques fonctionnent selon un nouvel agencement mondial. L’argent circule libre comme l’air, poussé ça et là par le vent, dérégulé, instable, incertain. Ce sont les idées qui sont restées verrouillées. Et, avec les idées, les identités. […]

J’ai adoré l’idée que les concepts de nationalité et de nationalisme allaient appartenir à un rêve du XIXe siècle et à un cauchemar du XXe, à présent fini.
L’Union européenne s’est fondée sur un système diplomatique plutôt que parlementaire, disons. Ainsi, ce qui s’est passé derrière des portes closes, pour apparaître dans des notes secrètes, a davantage affecté nos vies que ce qui s’est passé dans nos parlements. Tout ce que nous savions de la Commission européenne, c’étaient ses décisions, dans lesquelles nous n’avions aucune part. Quand les membres des conseils des ministres européens se réunissaient, ils faisaient des déclarations vagues et posaient pour une photo. Personne ne savait ce qu’ils avaient vraiment décidé, ni comment. Le Parlement européen n’est qu’un vaste et coûteux alibi pour la transparence. […] Il y eut ainsi deux blocs : les citoyens européens, qui avaient de moins en moins de pouvoir, et les dirigeants européens, qui en avaient de plus en plus au fil des ans. Les dirigeants ont souvent berné le peuple ; les dirigeants semblaient savoir ce qui était le mieux pour le peuple. […] Libération

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