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À Clichy-Montfermeil, les défaillances de l’État ont favorisé les courants les plus rigoristes. Un livre de Gilles Kepel.

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(…) « Notre pari, ici, est de contribuer à rendre ces quartiers intelligibles, en observant au quotidien comment s’y réalise – ou non – la promesse républicaine », écrit Gilles Kepel, sachant que « notre avenir commun » dépend de la concrétisation de cette promesse. Or ses travaux révèlent que les défaillances de l’État (avant qu’il n’engage des milliards d’euros dans la rénovation urbaine)

ont favorisé l’installation à Clichy-Montfermeil d’un islam rigoriste susceptible de substituer ses valeurs à celles de la République et ses références culturelles à celles de la France.

L’islam émerge à Clichy-Montfermeil au cours des années 1980 dans un contexte en tout point dégradé : chômage endémique, déréliction de la culture ouvrière et du communisme municipal, développement de la délinquance et du trafic de drogue, fuite des populations européennes et maghrébines qui en ont les moyens, remplacées par des familles originaires d’Afrique subsahasubsaharienne.

Cette désagrégation sociale coïncide avec l’arrivée dans l’agglomération des missionnaires du Tabligh (en français : la propagation de l’islam).

Fondé dans les années 1920 en Inde, ce mouvement prosélyte a progressivement étendu son action aux diasporas musulmanes des pays occidentaux.

La faiblesse des pouvoirs publics (et la naïveté de l’Église, devrait-on ajouter au constat de Gilles Kepel) permettent au Tabligh d’occuper le terrain social, culturel et cultuel.

Le Tabligh « se réclame de la sacralité religieuse pour ramener à l’islam toxicomanes et dealers d’origine maghrébine ou sahélienne, écrit le politologue. […] Les jeunes qu’il récupère ont le sentiment qu’ils participent, grâce à lui, au salut et à la régénération morale et sanitaire d’un quartier abandonné par les institutions ». La socialisation par ce mouvement se traduit d’ordinaire « par une sorte de corsetage mental et spirituel tendant à l’accomplissement littéral et rigoriste des prescriptions du dogme dans une perspective de préservation de l’identité islamique contre tout risque d’adultération ». Selon Gilles Kepel, le Tabligh continue de recruter des adeptes, malgré la concurrence des salafistes soutenus par l’Arabie Saoudite.

D’autres forces ont contribué à structurer l’islam à Clichy-Montfermeil (Gilles Kepel évoque l’influence de l’imam Dhaou, issu de la mouvance des Frères musulmans) de sorte que ces deux communes comptent aujourd’hui une dizaine de lieux de culte de taille variable, desservant environ 12 000 pratiquants.

En France, le ministère de l’Intérieur a dénombré 2 368 mosquées et salles de prière à la fin de 2010 (dont 267 à Mayotte), soit 565 de plus qu’en l’an 2000 –

ce qui correspond à l’ouverture d’un lieu de culte par semaine au cours des dix dernières années. (…)

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