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Une partie de la nervosité observée sur les marchés semble être liée à la participation du secteur privé à l’opération d’échange d’obligations de la Grèce dont les détails doivent être révélés plus tard cette semaine.

Ceux qui sous-estiment le mélange explosif que forment les coûts de sauvetage accrus et le ressac géopolitique qui suivrait une défaillance désordonnée de la Grèce et sa sortie de la zone euro le font à leurs risques et périls.

C’est l’avis de l’analyste géopolitique Pierre Fournier, de la Banque Nationale du Canada, qui énumère aujourd’hui par ordre chronologique les 12 conséquences d’une faillite de la Grèce et de son exclusion de la zone euro.

1. Les créanciers de la Grèce seraient forcés d’accepter des décotes de 80 à 90%.

2. Les pays créditeurs seraient contraints d’honorer leurs garanties à l’égard du fonds de secours et de recapitaliser la BCE. Et cela, après avoir longtemps assuré à leurs populations que ce scénario ne se produirait jamais, ce qui attiserait l’hostilité grandissante à l’endroit des partis au pouvoir et des élites politiques de l’UE.

3. Les banques européennes seraient exposées à des niveaux encore plus élevés de pertes des secteurs public et privé. Après être venues au secours de pays lourdement endettés, elles seraient forcées de secourir des banquiers impopulaires sur le plan politique.

4. L’attention des marchés se tournerait immédiatement vers le prochain maillon faible: le Portugal. Redoutant un défaut de paiement, les investisseurs se mettraient à vendre massivement leurs titres de créance portugais.

5. Les contrôles des mouvements des capitaux mis en place par la Grèce après sa faillite et sa sortie de la zone euro seraient vus par les Portugais et par d’autres comme un signal impérieux de retirer leur argent de leurs banques tant qu’ils le peuvent encore. Cette panique serait accentuée par la vue de voitures et de bateaux que l’on fouille dans les ports et aux frontières pour empêcher les Grecs de fuir le pays en emportant des euros.

6. Pour limiter la contagion, l’UE serait forcée d’échafauder un deuxième plan de sauvetage, cette fois pour le Portugal.

7. Le fonds de secours ou la BCE, voire les deux, seraient contraints d’acheter des obligations espagnoles et italiennes en grande quantité pour empêcher leurs taux de monter en flèche. Fortement exposée au Portugal, l’Espagne en souffrirait particulièrement.

8. L’effondrement de la Grèce, le ralentissement économique au sein de l’UE et les pressions du public sur la scène intérieure conduiraient les gouvernements de l’Irlande et du Portugal à exercer plus de pression en faveur de la radiation partielle de dettes. Cela irait à l’encontre des promesses faites par l’Allemagne, la France et d’autres pays que l’annulation partielle des dettes accordée à la Grèce serait un cas unique.

9. Même en faillite, la Grèce aurait encore besoin d’une aide financière importante, car la drachme ne serait pas immédiatement acceptée comme moyen de paiement hors du pays. La Grèce aurait donc besoin de l’aide de l’UE ou du Fonds monétaire international (FMI) pour régler ses importations d’aliments, de médicaments et d’énergie, ainsi que pour recapitaliser son système bancaire. Les citoyens des pays créditeurs seraient encore plus en colère lorsqu’ils constateraient que leurs impôts continuent d’être envoyés à la Grèce même après sa faillite.

10. L’appel à des fonds supplémentaires pour calmer les marchés coïnciderait avec des niveaux record d’opposition à de nouveaux sauvetages dans les pays créditeurs. Déjà supérieure à 60% en Allemagne et aux Pays-Bas, par exemple, l’opposition aux sauvetages grimperait à plus de 80% après l’effondrement de la Grèce. Puisque tout le temps et l’argent investis pour sauver ce pays l’auraient été en vain, bien peu de gens seraient favorables à ce que l’on recommence tout le processus pour le Portugal et pour d’autres.

11. Les appuis à d’anciens partis marginaux anti-UE, à l’extrême gauche ou à l’extrême droite, augmenteraient fortement, ce qui entraînerait l’éclatement des coalitions gouvernementales en Finlande et aux Pays-Bas.

12. L’effondrement de la Grèce et la détérioration de la conjoncture en Europe conduiraient l’Italie, l’Espagne et même la France à mettre ouvertement en doute la sagesse de l’approche d’austérité défendue par l’Allemagne. Ces pays feraient probablement ensemble pression sur l’Allemagne afin qu’elle assouplisse sa politique consistant à consentir de l’aide en échange de mesures d’austérité sévères. Il deviendrait d’autant plus difficile pour les pays de l’UE de trouver un terrain d’entente.

LA PRESSE.CA

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