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Des convois de shit pour la Corse étaient glissés dans des ferries.

Deux voire trois convois de shit et une saisie de 300 kilos de résine en 7e chambre correctionnelle. « C’est comme dans un film, il y a les acteurs principaux et ceux qui ouvrent et ferment les portes », postule le président Patrick Ardid devant sa brochette de prévenus : six Vauclusiens dont certains affichent des états de service sacrément chargés. Un retardataire se fait allumer. « On ne vous a pas dit que c’est à 8h30 l’audience ?! », peste le juge. « Désolé, je suis tombé dans les bouchons ! », s’aplatit Esama Bouayadi, 29 ans, simple silhouette dans l’affaire. « Vous ne vous êtes pas fait mal au moins ?! », le casse le magistrat.

« La complicité de marins des compagnies maritimes »

Au départ de cette procédure dévolue à la JIRS de Marseille, un renseignement anonyme parvenu à la PJ d’Ajaccio signalant qu’un certain Dominique Tafanelli, 46 ans, dirigeant de sociétés à Sartène (Corse-du-Sud), connu pour un précédent trafic avec le Maroc, s’approvisionne auprès de trafiquants vauclusiens en résine de cannabis qu’il fait acheminer sur l’île, « grâce à la complicité de marins des compagnies maritimes assurant la liaison avec la Corse », précise le parquet de Marseille. Pas remis d’une opération chirurgicale, le présumé commanditaire, écroué aux Baumettes, sera jugé ultérieurement. De filatures en écoutes, les enquêteurs ont tracé les contours d’une « association de malfaiteurs ». Recrutée dans la sphère avignonnaise, l’équipe paraît pivoter autour de Tarik Berkani, 36 ans, multirécidiviste (six condamnations dont deux pour infraction à la législation sur les stupéfiants à 4 ans ferme en 1998 et 8 ans en 2006).

« Arrête, arrête ! Dis pas ça au tel ! »

Les conversations qui transitent par portables occultes et spécialement dédiés au trafic n’ont que l’apparence d’un business opportuniste de voitures d’occasions, de baskets et même de vases. L’interlope a vite fait de percer. Comme cette épouse qui s’enflamme : « Tous ces fils de putes pour tes affaires de merde ! » – « Arrête, arrête ! Dis pas ça au tel ! », panique le mari. Il est question aussi de « récupérer 110 paires de baskets et les vases » ou plus crûment de « la vente des armes » ou encore d’un « rendez-vous à minuit comme d’habitude vers la prison ».

Le 9 novembre 2009, l’étau se referme sur un convoi descendant de la Porte d’Orléans à Paris. Au péage de Vienne, les policiers serrent l’ouvreuse, une BMW Série 1 conduite par Nabil Mohatta, 33 ans, avec Berkani pour passager. Derrière et déjà prévenu, un 4X4 BMW X5 volé et récupéré dans un HLM d’Entraigues, conduit par Rachid Khemaissia, 29 ans, avec Ludovic Munoz, 27 ans, prend la sortie d’Ampouis et percute un véhicule des policiers. Bonne pioche, grosse prise. 291 kilos de résine dans la carlingue. Les interpellations s’enchaînent. Ait Bouziane, 47 ans, avoue un précédent voyage le 20 août 2009. Un troisième convoi du 22 octobre 2010, matérialisé par une Audi descendue par Nabil Mohatta et remise à Tafanelli à Sartène, est âprement contesté chez le juge d’instruction Claude Choquet.

« Délinquants chevronnés, pas des dealers maximo »

« Je reconnais deux voyages par la route », a minimisé Tarik Berkani qui se veut simple livreur rémunéré 5 000 euros l’aller-retour. 10 ans de prison sont requis à son encontre, ès qualité de « maître d’œuvre » en récidive. « Si on a à faire à des délinquants chevronnés, on n’a pas devant nous des dealers maximo », venait de dire le substitut Mirkovik qui promettait de ne pas prendre de « réquisitions castristes ». Des peines de 4 ans sont réclamés contre Ait Bouziane, Ludovic Munoz et Faycal Kebaili. 3 ans contre Bouayadi et 2 ans contre Nabil Mohatta.

Pris dans des écoutes, le seul marin identifié de la SNCM dans le trafic a échappé aux poursuites. Maître d’équipage au pont de manœuvre et d’embarquement sur un ferry, il avait pourtant reçu un appel téléphonique de Dominique Tafanelli annulant leur rendez-vous. C’était au lendemain de la saisie des 300 kilos de résine.

La Marseillaise

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