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Comme chacun sait, “nul n’est censé ignorer la loi”. Gravé dans le marbre du droit romain, l’adage ne signifie évidemment pas que tout citoyen est supposé connaître les quelque 8 000 textes législatifs en vigueur et leurs 110 000 décrets d’application. Mais que ceux-ci sont accessibles, intelligibles et applicables.

Or, trop souvent, c’est encore loin d’être le cas. Le goût très français pour les lois “bavardes”, inutiles, redondantes, d’affichage ou de circonstance a été maintes fois dénoncé par les meilleurs esprits. Aujourd’hui, plus encore qu’hier, cette maladie nationale paraît incurable. Mais il est un autre travers que nous ne parvenons pas à corriger, comme vient de le souligner, une nouvelle fois, le Sénat dans son rapport annuel sur l’application des lois : nombre de lois adoptées par le Parlement continuent à rester sans effet faute de textes réglementaires d’application.

Ainsi, sur les 59 lois promulguées au cours de la session 2009, 35 prévoyaient des décrets ou arrêtés de mise en oeuvre. A la fin de l’année parlementaire, soit le 30 septembre 2010, 3 avaient reçu l’intégralité de leurs textes d’application, 19 en étaient partiellement pourvues et 13 n’en avaient pas encore vu le début du commencement. Le Sénat relève sobrement “une nette dégradation”. Le nombre de lois augmente et le nombre de dispositions appelant un suivi réglementaire explose : 670 au cours de cette session, contre 615 l’année précédente et 395 en 2007-2008. En revanche, le taux de publication des mesures prescrites s’affaisse : 20 %, contre 27 % en 2008-2009 (…)

Nous en sommes loin. Pour les 18 lois nécessitant un suivi réglementaire qui ont été votées avant le 31 mars 2010, et auraient donc dû, selon la règle de M. Fillon, être intégralement mises en application au 30 septembre, à peine 39 % des mesures prévues ont été prises.

Ce constat contredit cruellement les promesses de revalorisation du travail législatif. Non seulement le Parlement continue trop souvent à travailler dans l’urgence, mais, en outre, les textes qu’il adopte restent trop souvent inapplicables. Un exemple : la loi créant une allocation journalière d’accompagnement d’une personne en fin de vie a été votée, à l’unanimité, en février 2010 ; sept mois plus tard, aucun de ses décrets d’application n’était publié. Comme dirait le premier ministre, ce n’est pas un gage de crédibilité politique.

Le Monde.fr

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