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Le Japon croule sous une des dettes les plus élevées du monde, emprunte plus qu’il ne gagne et refuse d’envisager de nouvelles sources de revenus.

Ce qui, pour un particulier, mènerait à la saisie et l’interdiction bancaire, n’attire à l’État japonais que des sermons vite oubliés.

Alors que la situation budgétaire de la Grèce, du Mexique ou de Dubaï agitent ces dernières semaines les marchés mondiaux, le Japon, malgré des finances publiques dans un état tout aussi désastreux sur le papier, ne semble inquiéter ni les investisseurs, ni les agences de notation.

Pour la première fois depuis 1946, le Japon va émettre plus de dette qu’il ne percevra d’impôts lors de l’année budgétaire 2009-2010, qui s’achève fin mars. Selon l’OCDE, qui admoneste régulièrement Tokyo à ce sujet, son déficit budgétaire dépassera les 10% du produit intérieur brut l’an prochain. Sa dette publique flambera à 204% du PIB: en la matière, seul le Zimbabwe fait pire.

A l’origine du problème : les plans de relance mis en oeuvre à répétition depuis les années 1990, ainsi qu’un système fiscal peu lucratif pour l’État, avec notamment une taxe sur la consommation exceptionnellement basse pour un pays développé (5%). De plus, le nouveau gouvernement de centre-gauche de Yukio Hatoyama s’est engagé à n’augmenter aucun impôt avant 2013.

Si nous étions le Botswana, on verrait immédiatement que nous prenons l’eau. Mais le Japon est comme le Titanic : notre économie est tellement grosse que personne ne s’aperçoit que nous coulons,” déplore Noriko Hama, économiste à la Doshisha Business School de Kyoto.

N’importe où ailleurs, pareille situation budgétaire “mènerait droit à une annulation forcée de la dette ou même à l’instauration d’un État fasciste,” poursuit-elle. Mais pas au Japon, dont la dette continue de jouir du troisième ou quatrième meilleur score possible chez les agences de notation.

Le montant de la dette, en soi, ne dit pas tout concernant les qualités du Japon en tant que débiteur,” justifie James McCormack, analyste chez Fitch.

Des taux d’intérêt très bas permettent à l’État de contracter une dette exceptionnellement lourde, tout en déboursant des intérêts identiques à ceux que doivent payer d’autres pays dont l’endettement est moindre,” explique-t-il.

M. McCormack met également en avant “l’énorme stock d’épargne” des Japonais, dans lequel le gouvernement a encore bien de la marge pour puiser.

Autre facteur positif : la dette nippone est, à plus de 93%, détenue par des investisseurs japonais. Dans un pays en proie à une déflation record et où la Bourse a chuté de près de 75% en 20 ans, des bons du Trésor au rendement de l’ordre de 1,3% continuent d’offrir un taux d’intérêt réel intéressant.

Cette quasi-absence de dette en devises rend improbable un scénario de crise du type Mexique ou Argentine. “Il est toujours possible de monétiser une dette en monnaie locale,” rappelle Hervé Lievore, stratège chez AXA.

La monétisation consiste à faire tourner la planche à billets pour acheter les nouveaux bons du Trésor. Une pratique dangereuse, génératrice d’hyperinflation et que la Banque du Japon a exclue, mais qui, en dernier recours, reste toujours préférable à la faillite de l’État.

Le seul rayon de soleil, dans cet affreux problème de la dette, est qu’elle est entièrement détenue à l’intérieur du pays et donc beaucoup plus gérable,” notait le secrétaire général de l’OCDE Angel Gurria, de passage fin novembre au Japon. “La question est: quand cela va-t-il commencer à inquiéter les marchés? Eh bien, nous ne voulons pas le savoir, car alors il sera trop tard.

AFP

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