Fdesouche

Dans les airs comme sur mer, le transport, de passagers comme de fret, est sinistré. On enregistre une diminution générale de l’utilisation des avions et des bateaux, comme de leur vente et de leur construction.

En cause, divers facteurs, dont l’appauvrissement et le pessimisme des consommateurs, l’insuffisance de la capacité d’absorption de la production par les marchés déprimés, le prix du pétrole et des matières premières, et même la sous-capacité de certains ports.

La mondialisation, dont les premiers instruments matériels sont les voyages et le commerce international, en prendrait-elle un coup ?

D’abord, l’aviation.

Les compagnies aériennes européennes sont dans une “situation désespérée”, alors que le volume du trafic aérien a diminué de 2,3% sur l’année en juillet, leur mois estival le plus actif, a indiqué le 9 septembre 2009 le secrétaire général de l’AEA (Association of European Airlines, représentant 33 compagnies européennes).

“Si le secteur ne peut pas gagner de l’argent pendant la haute saison estivale, il est clairement dans une situation désespérée, or nos membres continuent à publier des pertes”, a-t-il souligné. Plus de détails ici.

Dans le reste du monde, la situation n’est pas meilleure. Les pertes sont abyssales : plus de 6 milliards de dollars au premier semestre 2009, selon l’IATA (Association internationale du transport aérien, représentant 230 compagnies).

Tous les acteurs du marché sont touchés et les transporteurs à bas coût ne sont pas épargnés. Il faut dire qu’ils ne peuvent, eux, bénéficier des aides publiques.

Certaines astuces consistant, pour lutter contre les pertes, à faire payer l’enregistrement, le transport d’un bébé, une place près d’un hublot, un valise supplémentaire, les boissons, etc., deviennent courantes et sont évidemment peu appréciées des voyageurs.

Le transport aérien de marchandises va encore plus mal, à telle enseigne qu’Air France-KLM devrait transférer le cœur de son activité fret à sa filiale néerlandaise à bas coûts, Martinair.

Pour l’industrie aéronautique, 2009 devrait rester, pour Airbus et Boeing, comme la plus mauvaise année en termes de commandes depuis au moins 15 ans.

Ensuite, la marine.

En mai 2009, les chantiers navals Hyundai, en Corée du Sud, pays qui a livré 38 % des navires neufs en 2008, n’avaient encore enregistré aucune nouvelle commande depuis le début de l’année, contre 107 en 2008. Le pays tout entier, seulement 9 au premier trimestre, contre 214 en 2008.

Bae Young-il, chercheur au Samsung Economic Research Institute, prédit une crise mondiale de la construction navale à l’horizon 2011-2012. Le cycle de construction d’un navire étant de deux à trois ans, l’assèchement des commandes d’aujourd’hui se traduira pleinement dans les faits à ce moment et coïncidera avec une baisse des prix, du fait du nombre de navires inutilisés sur le marché.

En juillet 2009, 10.500 navires étaient en construction, dont 4.000 commandés en 2008, et l’OCDE constatait une chute des commandes de plus de 90 % au premier semestre. Le courtier maritime Barry Rogliano Salles (BRS) estimait que les annulations de commandes pourraient s’élever à 20% du carnet de commandes mondial et qu’une grande partie des nouveaux chantiers navals, construits hâtivement par le jeu de la spéculation, allait disparaître. En première ligne se trouvant les grandes nations de la construction navale, Corée, Chine et Japon.

Aujourd’hui, ce mouvement de fond se confirme, malgré un semblant de rebond, qui a été très passager.

Le Baltic Dry Index (indice composite du transport maritime en vrac sec, révélateur du volume du commerce maritime international) est repassé en juin au-dessus des 4.000 points et a commencé juillet à 3.672, du fait des besoins de la sidérurgie chinoise. Mais on reste loin des 12.000 points de juin 2008 : un rapport baissier de 3 à 1 en un an seulement !

L’excédent structurel de navires, à la suite des commandes massives de 2007 et 2008 – plus de 1.000 bateaux seront livrés en 2009 et 2010 – devrait perdurer jusqu’en 2011, estime la Société Générale. Cependant, note Barclays, pas plus de 18 % des commandes n’ont été livrées depuis janvier et les annulations se multiplient.

En revanche, le manque de capacités portuaires continue de ralentir le commerce de vrac. A la mi-juin, on ne comptait pas moins de 154 navires Capesize (150.000 tonnes ou plus) faisant la queue devant les principaux ports du Brésil, d’Australie et de Chine, soit 18 % de la flotte mondiale.

Un autre révélateur de la crise : le port de Rotterdam, troisième mondial, représentant 35 % du commerce de l’Europe du Nord, a vu son activité s’effondrer au premier semestre 2009, pour les importations, de 16,6 %, et pour les exportations, de 4,6 %.

Dans le détail, voici l’évolution du trafic de ce port : les minerais et ferrailles : – 61 % ; les entrées de céréales : – 19% ; le pétrole brut : – 4 % ; le charbon : – 28% ; les automobiles : – 14% ; les cargos en général : – 27% ; les containers : – 15%.

Les frets pétroliers ont également cédé du terrain.

Pendant ce même premier semestre 2009, 462 bâtiments ont été mis en démolition.

La surcapacité de la marine marchande, par rapport aux besoins des affréteurs, paraît évidente. Mais, pas plus que celle du transport aérien, ce n’est la cause de la crise du commerce mondial. La mondialisation pourrait bien nous réserver la surprise de son déclin.

Fdesouche sur les réseaux sociaux