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Après la crise qui a frappé Dubaï, les économistes et politiques donnent de la voix pour défendre la finance islamique, sur laquelle cet incident jette le trouble. Il ne faudrait pas se priver des capitaux du Golfe… même si Dubaï a montré que ce système n’était pas forcément plus fiable que son équivalent anglo-saxon !

Ne condamnez pas la finance islamique trop tôt : on a à peine commencé à toucher aux dollars du Golfe ! La crise qui a secoué Dubaï la semaine dernière, en jetant un doute sur cet émirat au succès de façade, a également attisé la méfiance autour de la finance islamique…

Une méfiance que les « experts » s’échinent aujourd’hui à dissiper : « les économistes et les fins connaisseurs de cette finance d’un genre nouveau, puisque religieuse, reconnaissent que le cas dubaïote doit être médité, concédait un article du Monde daté du 3 décembre 2009 (voir notre illustration ci-dessous). Mais ils mettent en garde contre les amalgames et les jugements hâtifs. » Nous avons eu une petite crise, mais tout va s’arranger… un refrain déjà entendu quelque part !

Pour défendre la finance islamique: ses théoriciens, ses bénéficiaires et ses lobbyistes

Malgré la crise à Dubaï, politiques et experts veulent sauver la finance islamique !

« Paris croit à la finance islamique », annonce le papier en titre. Et pour cause : le premier master de finance islamique en France a été inauguré le 25 novembre au Palais Brogniart par l’université Paris Dauphine.

Et, oh surprise, tous les intervenants du colloque qui vantaient les mérites de la finance « chariah compatible » sont invoqués pour ramener à la tranquillité les esprits inquiets : Christian Sautter, adjoint à la mairie de Paris désireux de faire financer ses grands projets par les fonds du Golfe, Olivier Pastré, auter d’un ouvrage sur le sujet, Elyes Jouini, responsable du nouveau diplôme… Il ne manquait plus qu’Hervé de Charette, président de la chambre de commerce franco-arabe !

Mais le principal argument en faveur de ce principe est tenu par Gilles Saint-Marc : « L’intérêt de la finance islamique pour la France n’a pas de raison d’être affecté par cette crise. » Or, s’il est présenté comme simple « avocat associé chez Gide Loyerette Noue », M. Saint-Marc est également président de la Commission pour la finance islamique de Paris Europlace !

Comme pour la crise de la finance anglo-saxonne, ce sont donc les théoriciens, bénéficiaires ou lobbyistes qui disent aux sceptiques de bien vouloir ranger leurs inquiétudes au placard !

La finance islamique protège de beaucoup de choses… mais pas de l’insolvabilité !

« L’incident Dubaï » est ainsi minoré : Dubaï n’est qu’un emprunteur et la solvabilité de l’Etat qui vient à sa rescousse, Abu Dhabi, « ne fait aucun doute ». Mais alors pourquoi Dubaï s’est-il effondré une première fois ? Car il a été, temporairement, insolvable ! Et, malgré de beaux principes éthiques et de généreux donateurs, la finance islamique ne protège pas contre le défaut de trésorerie, cet incident banal, point de départ de toutes les paniques financières, depuis 1929 jusqu’aux subprimes.

L’évaluation de la solvabilité des émirats ne se base que sur un seul critère : leur rente pétrolière. Que le cours du pétrole s’effondre et les sukuks, « titres de propriétés islamiques » (équivalents des bons du trésor), tomberont avec !

Une hypothèse pas si grotesque, puisqu’elle était encore début novembre, soulevée par la Société Générale dans un rapport prévenant ses gros investisseurs d’une possible « réplique » au séisme des subprimes, alimentée par la dette des Etats.

Ironie du sort, sur cette même page 13 du monde ce jour là, un très bon article de Marc Roche signalait l’arrivée de « vautours » de la City, venus racheter la dette toute fraîche des établissements dubaïotes en difficulté… Une fiction, les risques d’autres secousses dans les émirats ?

Mais il ne faut pas désespérer le Palais Brogniart, qui espère encore attirer quelques milliards de pétrodollars dans son escarcelle. Et le rêve, dans ces contrées, ne s’est pas évanoui pour tout le monde : alors qu’une agence lyonnaise se félicitait d’organiser l’inauguration du Burj Dubaï, la plus grande tour du monde, l’adjoint à la mairie rassurait ses administrés sur un projet de reconstitution de quartiers historiques de Lyon dans l’émirat, « toujours dans l’air du temps ». Tant que les châteaux de sable ne s’effondrent pas, il y aura toujours des architectes !

Marianne2

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