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La crise a profondément dégradé la situation économique de la péninsule hellénique. A tel point que le mot faillite est dans tous les esprits. Fantasme ou risque réel ?

La Grèce serait-elle le vilain petit canard de la zone euro ? La péninsule hellénique a été au coeur des discussion des ministres des Finances de l’Eurogroup, mardi 1er décembre à Bruxelles. Ces derniers estiment que la situation de la Grèce est “préoccupante” à cause de l’explosion de ses déficits publics.

La Grèce a récemment nettement revu en hausse ses pronostics de déficits. Le ministre des Finances Georges Papaconstantinou s’attend à un déficit de 9,4% du produit intérieur brut (PIB) en 2009, à environ 30 milliards d’euros. La dette publique, de son côté, doit atteindre 113,4% du PIB cette année. Dans les deux cas, Athènes est très au dessus des limites européennes – respectivement 3% et 60%. Le pays est d’ailleurs dans le collimateur de Bruxelles pour déficit excessif.

Entrée officiellement en récession au quatrième trimestre 2008, la Grèce doit subir en 2009 une contraction de son PIB de 1,2% et de 0,3% en 2010, selon le projet de budget, sur fond d’augmentation du chômage (fixé à 9,7% pour 2010 contre 9% en 2009) et de recul de compétitivité de l’économie. Mais la crise n’explique pas tout. Même en période de croissance, le pays ne parvient pas à réduire ses déficits.

La Grèce souffre en effet d’un “déficit structurel chronique depuis son entrée dans la zone euro en 2001“, explique Philippe Sabuco, économiste chez BNP Paribas. L’économie souterraine dans les services à domicile (plomberie, construction, etc.) et dans le tourisme est estimée à environ 20% du PIB. Son administration fiscale est désorganisée et dispose de peu de moyens : la collecte de l’impôt est donc peu efficace. Les niches fiscales sont nombreuses et l’assiette de l’impôt sur le revenu est très étroite.

Résultat : les recettes fiscales ne permettent pas de combler les dépenses, plombées par un système de retraite très généreux et l’indemnisation du chômage. L’économie grecque est en outre relativement fermée : le pays exporte peu. Quant à la consommation des ménages, si elle a été très dynamique ces dix dernières années, souvent à la faveur d’un endettement massif, elle a fortement ralenti depuis la crise.

Le projet du budget déposé par le gouvernement grec la semaine dernière au Parlement, prévoit la réduction du déficit de 9,4% à 9,1% du PIB pour 2010, via notamment une réduction de 2,3% des dépenses publiques par rapport à 2009, et une hausse des recettes, par l’instauration de nouvelles taxes (sur les téléphones mobiles, sur les jeux, sur l’alcool et les cigarettes notamment). Ce n’est pas suffisant pour l’Eurogroup. “Nous insistons pour que dans l’année 2010 d’autres mesures” suivent, a déclaré son chef de file, Jean-Claude Juncker.

Mais le plus inquiétant reste la dette du pays, qui devrait s’envoler à 120,8% du PIB l’année prochaine. La note de la dette long terme de la péninsule a été abaissée en début d’année par Standard and Poor’s de “A” à “A-” , dernier cran avant de tomber dans la catégorie de qualité moyenne “BBB”. La dette à court terme a quant à elle été abaissée d’un cran, de “A-1” (meilleure note possible) à “A-2”. Résultat : la Grèce paie plus cher ses emprunts.

Après la révélation la semaine dernière des difficultés financières de l’émirat de Dubaï, tous les regards se sont tournés vers la Grèce. Depuis, la Bourse d’Athènes est en chute libre et l’écart de taux d’intérêt entre les obligations d’Etat grecques et allemandes, base de référence sur la zone euro, se sont creusé.

Ces évolutions, qui risquent d’augmenter le coût de la dette pour Athènes, attestent des inquiétudes sur la solvabilité de la Grèce. La presse internationale a évoqué un risque de voir le pays ne plus être en mesure de rembourser ses emprunts. Le mot de faillite est dans tous les esprits.

Une hypothèse que récusent les Européens. “Ce scénario de faillite est totalement aberrant, la Grèce n’est pas et ne sera pas en état de faillite“, a affirmé Jean-Claude Juncker.

Un pays de la zone euro ne peut pas faire faillite“, explique Eric Delannoy, vice-président du cabinet de conseil Weave, spécialiste du secteur financier, car “cela entraînerait des réactions en chaîne pour d’autres pays, comme cela avait été le cas lors de la faillite de Lehman Brothers.” “Ce serait catastrophique pour la crédibilité de la monnaie européenne“, ajoute-t-il.

Selon lui, ce qui inquiète réellement les pays de la zone euro, c’est qu’ils vont peut-être devoir mettre la main au portefeuille pour accorder des lignes de crédit à la Grèce. Et la facture pourrait bien être salée.

L’Expansion

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