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Lorsqu’il n’existe aucun organisme régulant le marché d’une matière première, comme par exemple l’OPEP (Organisation des Pays Exportateurs de Pétrole) qui influe sur le cours des produits pétroliers, ce marché est dit entièrement “libre”.
Cette “liberté” est en réalité le règne du plus fort, ou plus exactement, du plus riche et du mieux placé.
Ainsi en est-il du marché de l’or, dominé par un cartel formé par certaines grandes banques comme JP Morgan et HSBC, et du marché du gaz, notamment.

Sur ces marchés interviennent des “hedge funds” ou fonds spéculatifs, de nature privée, dont le but n’est pas l’investissement normal dans le marché, consistant à financer la production de richesses en échange d’une partie des bénéfices mais, essentiellement, comme leur nom l’indique, la spéculation.
Comment ? Le plus souvent, simplement en achetant en grandes quantités un type de biens au prix le plus bas possible, puis en le revendant au plus haut, progressivement ou en masse, notamment après avoir ainsi, en provoquant pendant un temps une baisse de l’offre, “étranglé” le marché et contribué à une hausse des prix.
A titre d’illustration parmi d’autres, c’est le mécanisme actuellement en branle sur le marché de l’étain à Londres, comme nous l’apprend une dépêche de l’AFP, datée du 8 octobre 2009.
Un discret investisseur possède actuellement plus de 90% de l’étain échangé sur le London Metal Exchange (LME), une situation légale, selon le régulateur du marché, mais qui fait grogner les acheteurs contre des prix jugés artificiellement élevés.“Nos rapports font état d’une position dominante, détenant plus de 90%” des stocks d’étain, a admis auprès de l’AFP le directeur de la régulation du London Metal Exchange, Diarmuid O’Hegarty.
L’investisseur, dont l’AFP s’est procuré le nom, est la société Ebullio, un fonds spéculatif londonien qui s’est lancé en janvier 2008 dans les investissements en matières premières.
Selon Peter Kettle, directeur des études de l’Itri (institut international de recherche sur l’étain, un organisme londonien représentant les industriels de l’étain), l’activité de ce fonds explique en partie la fermeté actuelle des cours de l’étain.
Les prix du métal, qui étaient tombés fin décembre à 9.700 dollars la tonne, sous le coup de la récession économique, ont repris la moitié de leur valeur depuis le début de l’année, bien qu’ils restent à bonne distance de leur record de mai 2008, à 25.500 dollars.
Après avoir frôlé 16.000 dollars début juin, ils évoluent autour de 15.000 dollars la tonne.
La situation suscite la grogne de nombreux courtiers opérant au LME, “sans doute parce qu’ils sont vendeurs à découvert” et qu’ils “vont devoir payer assez cher” pour obtenir de l’étain auprès du fonds d’investissement dominant le marché, explique M. Kettle.
“Des consommateurs estiment que le prix est actuellement plus élevé qu’il ne devrait l’être”, ajoute-t-il.
Les stocks d’étain n’ont cessé de gonfler depuis le début de l’année, atteignent 26.000 tonnes dans les entrepôts du LME, leur niveau le plus élevé depuis mars 2003. Alors que d’ordinaire la montée des stocks pèse sur les prix d’une matière première, elle n’a pas empêché cette fois l’ascension des cours.
“L’équilibre offre-demande explique le mouvement des prix”, objecte Nicholas Snowdown, analyste chez Barclays Capital, pour qui l’activité d’un investisseur dominant n’est pas en cause dans l’envolée des cours.
Les cours reflètent des anticipations de reprise de la demande dans les pays industrialisés, mais aussi les difficultés d’extraction du métal en Chine et en Indonésie, qui concentrent les trois quarts de l’offre minière, juge-t-il.
Le fonds, qui s’est refusé à tout commentaire, est vraisemblablement convaincu lui aussi que les prix de ce métal ont le potentiel de grimper, avec un beau jackpot à la clé.

Pour le régulateur du London Metal Exchange, le principal marché mondial des métaux non-ferreux, l’existence de cette “position dominante” se joue dans le parfait respect des règles du marché.

“Le marché a des règles sur la question des positions dominantes, elles s’appliquent, et donc le marché fonctionne correctement”, a affirmé M. 0’Hegarty. Celui qui est dans cette situation a l’obligation de prêter du métal aux autres acteurs du marché.
“Le LME juge que les affaires se font entre adultes consentants”, décode M. Kettle.
Ce “petit” métal, dédaigné par les analystes, a déjà derrière lui une histoire très agitée. A l’automne 1985, la cotation de ce métal avait été interrompue pendant quatre ans à Londres, signant le dernier chapitre de la “crise de l’étain”.
Cette crise avait été provoquée par un brutal déclin de la consommation après la récession des années 1981-82 dans la plupart des pays industrialisés. Le Conseil international de l’étain (ITC), cartel fédérant les principaux producteurs, avait pu en limiter l’impact en achetant et en stockant le surplus de métal jusqu’en 1985 lorsque, surendetté, il s’était déclaré en faillite. Privés de soutien, les prix s’étaient effondrés, entraînant la suspension de la cotation du métal.
AFP (via skynet.be)

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