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Tribune libre du lecteur Chateaubriand, partiellement réécrite et abrégée par la rédaction. L’image d’illustration n’est pas un faux. Voir ici

La ministre de l’Enseignement supérieur, Valérie Pécresse, entend faire entrer les universités dans l’ère de l’évaluation. Aujourd’hui pratiquée dans de nombreuses universités étrangères et dans la majeure partie des grandes écoles françaises, l’évaluation des enseignants par les étudiants n’est appliquée qu’avec parcimonie dans les universités françaises. (source)

Au moment où l’université française dépérit et se consume dans un laxisme continuel, il ne faut guère s’étonner d’une telle mesure. Dans une société qui n’a de cesse d’inverser les rôles, l’école et l’université demeurent le lieu d’une relation particulière, inadmissible aux yeux de l’idéologie actuelle, celle qui réunit l’enseignant, détenteur d’un savoir, et l’étudiant, qui souhaite y avoir accès.

Mais la banalité de cette affirmation semble aujourd’hui perdue pour beaucoup, et sans l’acceptation de l’autorité du maître sur l’élève, école et université perdent tout sens.

A l’évidence, si les enseignants notaient les copies des étudiants à leur juste valeur, les universités seraient vides… On y constate le plus souvent une absence totale de maîtrise de la langue, une faiblesse du raisonnement, une difficulté grandissante à développer un argumentaire logique, une syntaxe anéantie, un niveau de culture générale affligeant, l’incapacité à manier les connaissances mathématiques les plus rudimentaires etc.

Il devient dès lors urgent de rendre impossible toute réelle évaluation des connaissances qui permettrait de constater lucidement la catastrophe. L’initiative consistant à généraliser la notation des enseignants par les étudiants est un gadget qui participe de ce projet.

Sous le prétexte fallacieux de donner un signal fort à l’enseignant sur la qualité de son enseignement, on procède en réalité à une intimidation à son égard. Un système de notation efficace de l’enseignant supposerait que les étudiants soient à même de juger de la qualité du cours, alors qu’ils n’ont pas, bien souvent, le niveau requis. Ce qui sera noté chez l’enseignant, ce sera bien plutôt son caractère “sympa”, synonyme  d’“inoffensif” et “dénué d’exigences”.

Ce type de notation inversée pouvant avoir des suites sur la carrière de l’enseignant, il s’agit bien d’un processus d’intimidation, laissant clairement entendre aux récalcitrants qu’il leur faut — par exemple — abandonner toute exigence (rédactionnelle, orthographique, logique…).

Dès lors que la massification et la “prolétarisation” de l’enseignement sont de règle,  l’institution universitaire n’est plus appelée à fournir les meilleures formations possibles mais à “occuper” une jeunesse inemployable en lui délivrant des diplômes au rabais. L’enseignement supérieur ne joue plus qu’un rôle de “retardateur” , en permettant de repousser la confrontation des individus avec le “réel” et la définition de la place qu’ils pourront occuper dans la société. Car le système économique n’a de fait besoin que d’un nombre très limité d’individus réellement compétents : le gros des troupes est vite relégué à des tâches toujours plus subalternes. De futurs consommateurs. Car c’est bien cela qui importe le plus.

Pour en revenir à l’aberrant projet de faire noter les professeurs par leurs élèves, on peut s’attendre à ce que cette apparente contradiction soit résolue dans un proche avenir : le renouvellement des générations aidant, des enseignants incultes seront bientôt face à des étudiants bornés.

Soyons sûrs qu’avec l’actuelle réforme des lycées de Xavier Darcos, qui tend à vider toujours plus les programmes de leur contenu, ce phénomène ira s’accentuant. Et la boucle sera bouclé. Enseignants et élèves, enfin égaux,  s’évalueront mutuellement dans une médiocrité générale.

Article de Chateaubriand (lecteur), partiellement réécrit et abrégé par la rédaction.

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