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La bourse a baissé de 7 % encore ce vendredi, après une chute de 9 % lundi et 6 % mercredi, soit au final une chute de 22,16 % en une semaine. Dès lors, se posent de nombreuses questions : Pourquoi et quels sont les ressorts qui permettent une telle débâcle ? Comment les pouvoirs publics peuvent agir ? Quelles vont être les conséquences pour l’économie en général ? Et pour tout un chacun ?

I)COMPRENDRE LE MECANISME DE FINANCEMENT INTERMEDIE (VIA LES BANQUES)

Pour comprendre ce qu’il se passe, il faut connaître les mécanismes de création monétaire, et pour mieux y aider, remontons quelques siècles avant, du temps où l’or était une monnaie.

Acte 1 : Au départ les banques recevaient des dépôts en or, et cet or était prêté à d’autres agents économiques. La banque vivait de la différence entre les intérêts perçus des débiteurs et les intérêts versés aux créanciers. Ainsi, dans ce système, les dépôts font les crédits (sans dépôt d’or, pas de prêts à d’autres agents, donc pas de crédits !)

Un tel mécanisme était très lourd, pouvait aller quand l’économie n’était pas développée, et que le troc restait le meilleur moyen d’échanges entre les agents ! Néanmoins, avec le développement, il est vite apparu désuet, d’où la nécessité d’évoluer et de créer des moyens d’échange de monnaie entre agents plus souples.

Acte 2 : Création de la lettre de change (grosso modo le chèque comme nous le connaissons aujourd’hui) : Avec la lettre de change les agents s’échangent toujours de l’or mais celui-ci n’est plus présent physiquement. C’est par un jeu d’écriture sur les comptes détenus par les banques que l’or change de main. Pour les banques, cela change tout : les agents n’échangeant plus d’or physiquement, mais seulement par des jeux d’écriture !

Acte 3 : Les banques accordent des prêts en s’affranchissant de la quantité d’or qu’elles ont en stock. Puisque les banques vivent de la différence entre les intérêts des prêts octroyés et ceux payés aux détenteurs d’or, et comme l’argent échangé devient dématérialisé (un simple jeu d’écriture), les banques ont intérêt à accorder plus de prêts que ce qu’elles ont de stock en or : elles engrangent davantage d’intérêts de la part de leurs débiteurs et elles paient peu d’intérêts (en fonction de la quantité d’or qu’elles détiennent). Dans un tel système, ce ne sont plus les dépôts qui font les crédits, mais les crédits qui font les dépôts !

Acte 4 : La masse monétaire augmente, n’ayant plus de lien avec la quantité d’or détenue. Tant que la confiance des agents est présente, pas de problème : les agents se payent entre eux par des jeux d’écriture, et tout tourne. Le problème, c’est quand la confiance s’effrite : les créanciers des banques s’apercevant qu’on n’échange que du papier, peuvent venir demander leur or aux banques. Si le cas est isolé, pas de problème, la banque peut fournir et la confiance demeure ! Maintenant, si le cas se propage, la banque qui a accordé moult crédits, se retrouve avec de nombreux créanciers qui tous demandent leur or. Et elle ne l’a pas ! La banque fait faillite, les créanciers sont floués et n’ont plus que leurs yeux pour pleurer !

Ceci dit, tout cela est bien beau, mais, aujourd’hui, l’or est démonétisé, et comment cela peut expliquer la crise actuelle ? En fait, il faut bien voir qu’il existe une hiérarchie dans les monnaies, hiérarchie étant la même que précédemment quand il y avait l’or : il existe la monnaie « banque centrale » celle émise par les Banques centrales (en Europe la BCE), que les banques commerciales ne peuvent créer, comme jadis l’or et que les particuliers ne peuvent avoir que sous forme de pièces et billets. (Aucun particulier n’a un compte directement à la BCE).

Et il existe la monnaie scripturale (la monnaie qu’on a sur les comptes, monnaie créée par les banques commerciales quand celles-ci octroient des crédits à des particuliers). Or, un problème de liquidité se pose : Certaines banques commerciales ont aujourd’hui de nombreux clients insolvables (ou, ce qui revient au même, sont titulaires de créances qui ne pourront pas être recouvrées) et sont donc en difficulté : elles ne peuvent pas fournir en monnaie « banque centrale » leurs clients qui leurs demandent pièces et billets, et se retrouvent en faillite ! (comme précédemment certaines faisaient faillite car elles n’avaient pas l’or que venaient leur demander leurs clients !) Ceci déclenche une perte de confiance de l’ensemble des agents et pourrait mener à la faillite de l’ensemble du système (si tout le monde va chercher ses avoirs sous forme de billets !) A partir de là, que peuvent faire les pouvoirs publics ?

II)LES REACTONS POSSIBLES DES POUVOIRS PUBLICS

En réalité, plusieurs scénarios sont ébauchés, scénarios -soyons pessimistes- dont aucun n’est satisfaisant !

Scénario A : La banque centrale refinance massivement les banques commerciales

Nous l’avons vu, le problème actuel est un problème de liquidités (il manque aux banques commerciales de l’argent « banque centrale »). Certains peuvent se dire : facile ! Puisque ce n’est plus de l’or, les banques centrales n’ont qu’à mettre en marche la planche à billets, refinancer les banques commerciales et tout rentrera dans l’ordre (si les clients de ces banques viennent chercher des billets en masse, elles pourront fournir, pas de panique !).

Tout ceci est bien beau, mais aurait comme inconvénient de faire perdre confiance en la monnaie elle même ! (alors qu’aujourd’hui, c’est dans les banques que la confiance est perdue). En effet, comment pourrait-on croire que l’argent est « réserve de valeur » (une des propriétés que doit posséder l’argent) si on en émet autant qu’on veut, sans lien avec la richesse économique du pays ? En fait, ce scénario A est très inflationniste, et s’il était pratiqué à grande échelle, il y aurait des risques à ce que nous nous trouvions dans la même situation qu’au Zimbabwé (inflation de 100 000 % par an). La monnaie ne voudrait alors plus rien dire, et serait sans doute substituée par d’autres formes d’échange !

Par ailleurs, d’un point de vue politique, il est intéressant de constater qu’une telle décision ne pourrait être prise que par une personne non élue (M. Trichet, gouverneur de la BCE en Europe ou M. Ben Bernanke, président de la FED aux Etats Unis !). On notera qu’ils ont fait des gestes, notamment en baissant les taux d’intérêt !

Scénario B : Les Etats rachètent les banques

Si les banques ne sont pas refinancées par la banque centrale, une des solutions pourrait être celle utilisée jusqu’alors : les Etats eux mêmes rachètent les banques (en les nationalisant) et garantissent leurs solvabilités : Ainsi, les banques peuvent donner des billets aux déposants qui viennent chercher leurs dépôts puisque leur nouveau propriétaire (l’Etat) leur a donné des liquidités. D’un point de vue politique, cela pose un problème « éthique » : ce sont les contribuables qui vont éponger les faillites des banques ! Mais surtout ce scénario B n’est pas crédible car les Etats sont déjà eux-même hyper endettés. Ainsi, par exemple, la dette française atteint 1250 milliards d’euro au premier trimestre 2008, soit 63 % de son PIB ! Aux Etats Unis, la situation n’est pas meilleure : la dette fédérale atteint 10 000 milliards de dollars !

Autant dire, on demande à un borgne atteint de cataracte de conduire l’aveugle ! Avec le risque que les Etats eux même ne puissent un jour rembourser leurs dettes et être eux même insolvables, avec toutes les conséquences que cela implique : les fonctionnaires, les retraités, non payés, les bons du trésor non honorés etc !

Scénario C : Rien n’est fait : situation de crédit crunch

Un autre scénario pourrait être celui où les pouvoirs publics ne font rien. On se retrouve dans ce cas dans la même situation que celle de 1929, connue sous le nom de crédit crunch et décrite par Irving Fischer : en laissant faire, les faillites bancaires se multiplient, et nombre de déposants sont floués ! La conséquence, c’est qu’une bonne partie parmi eux se trouvent insolvables, sans argent, et il y a un effet domino. En fait, dans cette situation tout le monde recherche des liquidités et pour cela est prêt à vendre ses biens : il y a donc, sur l’ensemble des marchés de très nombreux offreurs et très peu d’acheteurs : les prix dans tous les domaines s’effondrent (on est dans le cas contraire que dans le scénario A), personne ne veut acheter, les entreprises n’arrivent pas à vendre leur production.

CONCLUSION

La situation est bien délicate. Le principal problème est le fait que les Etats ne sont pas crédibles à cause de leurs dettes abyssales ! Sinon, la situation B serait la meilleure : Et si un jour les Etats (surtout si c’est le cas des Etats Unis) n’arrivent plus à lever des fonds pour financer leur déficit, la crise qui en résulterait serait peut être la fin du capitalisme !

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