Aux heures de pointe, propices aux frotteurs, ou sur les quais déserts le soir, nombre de femmes sont sur le qui-vive alors que les agressions augmentent. Selon une étude de 2022, 70 % des femmes interrogées ont déclaré avoir été victimes d’au moins une violence sexiste et sexuelle dans les transports en commun franciliens. Et 80 % des sondées ont assuré rester en alerte lorsqu’elles prennent le métro, le bus ou le RER. « Il faut toujours faire attention quand on est une femme », résume Mariame. Qu’elles aient ou non connu de mauvaises expériences, les femmes croisées dans les transports franciliens décrivent toutes un état de vigilance.
À 22 h 30, le quai du RER A de la gare Nanterre-Préfecture est désert. Pendant de longues minutes, Léa, 31 ans, est la seule présence humaine. Emmitouflée dans son manteau, elle est aux aguets. C’est une station qu’elle n’aime pas beaucoup, la nuit. Comme toujours, son téléphone (chargé) est à portée de main. Elle y a enregistré un numéro d’urgence, qu’elle peut activer depuis sa poche. Le 3117, commun à la RATP et à la SNCF, figure dans son répertoire. Par ailleurs, elle aussi a déjà subi les assauts d’un frotteur.
À chacune sa technique. Yseult, 21 ans, scanne rapidement les passagers dès qu’elle entre dans une rame. Shana, 33 ans, fait toujours en sorte d’aller là où il y a du monde. Sélima, 24 ans, mise sur un vêtement ample lorsqu’elle veut camoufler une tenue de soirée. Casque sur les oreilles dans une rame de RER vide ce mercredi soir, la brune évoque une autre stratégie, bien à elle : lancer un regard noir dès qu’un homme suspect s’approche. […]
Aurore Bergé, ministre déléguée à l’Égalité entre les femmes et les hommes, et Philippe Tabarot, ministre des Transports, parlent d’une même voix pour que les actions déjà engagées et à venir réduisent des chiffres en hausse. Le constat de l’Observatoire national des violences faites aux femmes (Miprof) est en effet alarmant : l’année dernière, 3 374 victimes de violences sexuelles dans les transports en commun ont été enregistrées, soit une augmentation de 6 % par rapport à 2023, et de 86 % depuis dix ans.
« Dans neuf cas sur dix, ces victimes sont des femmes et 85 % avaient moins de 25 ans au moment des faits, précise Aurore Bergé. Cela installe chez elles une peur ou un renoncement à utiliser les transports en commun à certains horaires. C’est donc de notre responsabilité, État, collectivités et opérateurs, que de garantir leur sécurité. »









