Au palais de justice de Marseille, les magistrats les nomment les « narcotouristes », d’autres parlent des « vacanciers ». Phénomène purement estival, le tribunal juge régulièrement, en comparutions immédiates, des jeunes gens interpellés sur un point de vente de stupéfiants qui, une fois en garde à vue ou à l’audience, assurent être venus en vacances à Marseille.
Ils alternent la plage et les plans stups pour financer leur séjour en prêtant la main occasionnellement à un réseau du centre-ville ou d’une cité des quartiers nord de la ville. « L’explication des vacances revient régulièrement » , confirme Nicolas Ruby, chef de la section de la permanence de l’urgence du parquet de Marseille. Certains de ces « saisonniers » débutent parfois dès leur arrivée à la gare Saint-Charles car ils sont en quête d’un hébergement, d’autres lorsque l’argent commence à faire défaut. Une journée de vacation comme « charbonneur » – vendeur – rapporte entre 100 et 200 euros, celle de « chouf » – guetteur – entre 80 et 120 euros. […]
Le phénomène des narcotouristes peut d’autant mieux se développer, estime Nicolas Ruby, que les réseaux de drogue font face à une pénurie drastique de main-d’œuvre. La cinquantaine de morts, en 2023, liés au trafic de stupéfiants dont de nombreuses « petites mains » dissuaderait les candidats de cette activité devenue risquée. Même si, comme l’affirmait récemment à l’audience une présidente du tribunal : « Le trafic paie mieux à Marseille qu’ailleurs mais les tribunaux sont aussi plus sévères qu’ailleurs. »
A en croire Me Karim Bouguessa, avocat assidu de ces audiences, le phénomène des vacanciers serait néanmoins en déclin depuis cinq à six ans : « Fini, les étés où l’on venait partager les bons plans de travail saisonnier pour flamber plus. A cela une raison : Marseille fait peur. Il ne reste que les téméraires. »