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21/05/22

La grande école des sciences sociales est traversée par de violents conflits. En avril, ses nouveaux locaux ont été saccagés par des étudiants.

“Université raciste, chercheurs bourgeois on vous voit”, “1 blanc, 1 balle”, “brûlons le TGI”, “Charlie l’a mérité”, “les prisons en feu, les matons au milieu”, “youpin décolonial”, “nik les cis”, “stop les sciences coloniales”… Sur les sept étages du bâtiment de l’Ecole des hautes études en sciences sociales (EHESS), installée sur le campus Condorcet à Aubervilliers (Seine-Saint-Denis), des tags en lettres rouges ou noires délivrent des messages souvent rageurs et haineux, parfois contradictoires ou nébuleux. “Nous sommes en train de les recenser et de les photographier pour en faire un objet d’étude”, expliquait la direction juste après l’occupation des lieux, du 20 au 23 avril dernier.

(…) Ces actes de vandalisme interviennent à un moment où l’éminente institution, longtemps considérée comme le saint des saints des sciences sociales, connaît des difficultés sans précédent. Tourmentée par une sourde rivalité entre étudiants en master et doctorants, rongée par une bataille idéologique virulente, l’EHESS est entrée en crise.

(…) Dans une lettre ouverte publiée le 26 avril dernier, ces derniers fustigent “ce grand projet de spéculation immobilière, de gentrification et d’éloignement des classes populaires”. Le texte dénonce aussi des “caméras à tous les coins, balises, barrières, douves renforcées de barbelés et buissons épineux, vigiles avec chiens, badges limitant l’accès à la plupart des espaces” sur le campus, et pointe du doigt l’absence de lieux spécifiquement dédiés aux rencontres et aux échanges entre étudiants au sein de l’Ecole.

(…) Pour sa part, Jean-Frédéric Schaub, directeur d’études à l’EHESS, éreinte “ceux qui, pour des raisons politiques et sentimentales, font preuve d’indulgence à l’égard de ce mouvement”, car “tout cet argent cramé par ces destructions aura des conséquences très concrètes sur nos travaux de recherche et un certain nombre d’autres projets”, poursuit-il. L’historien et chercheur au CNRS Sébastien Fath, lui, n’hésite pas à s’en prendre directement aux auteurs des dégradations. “Détruire un outil de travail d’étude et d’émancipation intellectuelle n’est pas la meilleure manière de plaider pour l’avenir”, attaque-t-il, avant de se demander si “une certaine fermentation mêlant gauchisme bourgeois, nihilisme consumériste et illettrisme économique (focalisé sur l’épouvantail néolibéral) n’a pas cristallisé les choses.” Beaucoup s’interrogent sur le nombre réel d’élèves de la maison impliqués dans le blocus et responsables des dégradations. “Je dirai qu’il y avait un gros tiers d’étudiants venus d’autres universités, un tiers de black blocs ou casseurs, et un petit tiers d’étudiants de chez nous”, avance Christophe Prochasson. Signe d’un vrai malaise.

(…) D’un côté, les défenseurs de l’universalisme, qualifiés de “réactionnaires” par certains de leurs adversaires. De l’autre, des enseignants aux engagements radicaux, parfois séduits par les thèses racialistes ou indigénistes. Le sujet est tellement sensible que la plupart des enseignants qui acceptent de s’exprimer dessus le font sous couvert d’anonymat. 

Autocensure au sein de l’institution

(…)En 2018, ce directeur d’études de l’EHESS a fait partie des signataires d’un appel dans Le Point contre la réactivation de l’idée de race dans les universités. Quelques jours plus tard, lors d’un séminaire, dont le thème n’avait rien à voir, une jeune femme noire se présentant comme “une descendante d’esclaves” a pris la parole et l’a décrit comme un esclavagiste. Applaudissements dans la salle. Alors qu’il reprenait ses esprits dehors sur un banc, plusieurs de ses élèves, eux-mêmes issus de l’immigration, sont venus lui témoigner leur soutien. “Je leur ai demandé pourquoi ils n’avaient pas pris ma défense. Ils m’ont avoué leur peur de s’exprimer publiquement”, raconte le sociologue. “Après cet épisode, vécu comme une humiliation, j’ai demandé qu’on organise une rencontre avec les étudiants sur ce sujet. Mais ma requête n’a pas été suivie d’effet”, poursuit-il, déplorant une forme d’autocensure au sein de l’institution.

(…) L’Express

(Merci à BB)


26/04/22

Ce site de l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS) à Aubervilliers (Seine-Saint-Denis) a été occupé entre mercredi et samedi dernier par une centaine de personnes dont une poignée d’étudiants, selon la présidence. Le chiffrage des dégâts est toujours en cours mais s’annonce déjà élevé. Une plainte a été déposée ce mardi.

L’entre-deux-tours de l’élection présidentielle aura été tumultueux dans plusieurs institutions de l’enseignement supérieur. Après La Sorbonne ou Normale sup à Paris, c’est l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS) qui a été occupée sur son site du campus Condorcet à Aubervilliers (Seine-Saint-Denis). Samedi matin, le service de sécurité du campus a obtenu le départ des derniers occupants laissant derrière eux des dégâts considérables. « C’est impossible à chiffrer pour le moment mais nous serons probablement sur plusieurs centaines de milliers d’euros » […]

Communiqué de la direction de l’EHESS

Cette occupation, avec contrôle d’accès par les occupants, a entraîné des dégradations majeures. Les présidences de l’EHESS et du Campus Condorcet ont relevé des actes de vandalisme d’une violence inacceptable et ont constaté des vols et des pillages d’espaces. Au-delà de cette entreprise de destruction systématique, il a été relevé, parmi les tags et graffitis réalisés par les occupants, des menaces et des appels à la haine. 

La présidence de l’EHESS, par la voix de son président Christophe Prochasson, condamne fermement des agissements qui ne relèvent en rien d’un mouvement étudiant. Au-delà du mode opératoire destructeur, les occupants ont clairement attaqué l’université et la démocratie dans leurs tags.

Le Parisien ; Actu

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