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04/06/2021

“Il fallait que la vérité soit dite” : calomniée par des étudiants, Nadia Geerts est blanchie

Agrégée en philosophie, essayiste et chroniqueuse à “Marianne”, Nadia Geerts est en conflit avec le Conseil Étudiant de la Haute École Bruxelles-Brabant, en Belgique, dans laquelle elle enseigne. Réhabilitée par son établissement, elle témoigne.

Marianne : Pouvez-vous brièvement rappeler le contentieux qui vous opposait au Conseil Étudiant de la Haute École Bruxelles-Brabant?

Nadia Geerts : Il a commencé en octobre dernier, quand j’ai été exclue de la page Facebook qu’il gérait pour avoir publié un #JesuisSamuelPaty qui a déclenché une salve de commentaires haineux à mon égard. Le Conseil Étudiant a fini par exclure tous les protagonistes, me mettant donc sur le même pied que mes agresseurs en m’infligeant la même sanction. Le contentieux a redoublé en janvier, lorsqu’un ancien étudiant (qui a quitté cette école avant que j’y arrive et n’a donc jamais suivi mes cours !) m’a accusée publiquement (sur la page Facebook du Conseil Étudiant) de discriminer mes étudiants trop basanés, et que le Conseil Étudiant, au lieu de condamner ces propos calomnieux, les a approuvés. Enfin, en mars dernier, le Conseil Étudiant a voté une motion de défiance à mon encontre et s’en est ouvert à la presse, prétendant qu’il recevait chaque année des plaintes contre moi.

Dans un mail interne, l’école a affirmé qu’elle n’avait rien à vous reprocher. Comment prenez-vous ce geste de l’université à votre égard ?

Ce n’est pas une initiative spontanée. Mon avocate et moi avions sollicité une réunion de conciliation, étant donné que rien n’était fait pour rectifier les propos diffamants que le Conseil Étudiant avait fait circuler sur mon compte. Ma demande était depuis janvier que la vérité soit enfin dite par une instance tierce, qui connaît la totalité des faits qui se sont déroulés depuis octobre. J’estime que mes collègues, mes étudiants et évidemment moi-même, nous avions droit à un récit impartial sur ce qui s’est réellement produit depuis le mois d’octobre. De ce point de vue, la communication qui a enfin été adressée est un strict minimum : elle atteste que jamais la moindre plainte à mon sujet n’est arrivée sur le bureau de la direction et qu’en conséquence, mon dossier disciplinaire est vierge.

[…]

Marianne


22/03/2021

Mercredi soir s’est déroulée un assemblée générale des représentants étudiants des sept Unités structurelles (US) de la Haute Ecole Bruxelles-Brabant. A l’ordre du jour, la décision d’adresser un courrier au collège de direction et à WBE (Wallonie-Bruxelles Enseignement) intitulé “HE2B, les représentants étudiants en colère!”

L’enseignante laïque Nadia Geerts dans le collimateur

La HE2B a été secouée l’an dernier par une polémique au centre de laquelle se trouvait Nadia Geerts, en charge du cours de neutralité au sein de la Haute Ecole et également connue en tant que militante laïque. Sur la page FB du Conseil des Etudiants de la HE2B, l’enseignante avait marqué sa solidarité envers Samuel Paty, professeur français décapité par des fondamentalistes islamistes, provoquant des commentaires haineux et vindicatifs de la part de nombreux internautes. 

Voici le texte du courrier adressé au collège de direction de la HE2B :

“Ces derniers mois, les représentants étudiants de la Haute École Bruxelles-Brabant ont été cités pratiquement chaque semaine dans des articles par une enseignante de l’établissement, Nadia Geerts, agrégée en philosophie, essayiste, chroniqueuse dans Marianne, directrice de collection à la Renaissance du Livre, prix international de la Laïcité en 2019 et enseignante de neutralité au sein du domaine pédagogique de la HE2B. Ses articles ont commencé à la suite d’un accrochage sous une de ses publications sur un groupe privé administré par les représentants étudiants à propos de Samuel Paty. Articles qui ont repris de plus belle après l’annonce de Wallonie-Bruxelles Enseignement d’autoriser le port de signes convictionnels dans l’enseignement supérieur.

Maintenant, ça suffit ! Il n’est plus question pour les représentants étudiants de se laisser traîner dans la boue par une personne qui, depuis le début, ne s’est jamais gênée de réécrire l’histoire comme cela l’arrange, notamment quand elle écrit qu’elle n’a jamais eu de problème avec ses étudiants en le prouvant à travers une enquête alors que nous recevons chaque année des plaintes d’étudiants à son encontre, cette année ne faisant pas exception. Il n’est plus question non plus de laisser entendre qu’à cause du Conseil des Étudiants, elle n’ose plus se rendre sur son lieu de travail alors que plusieurs témoins l’ont vue sur le campus afin de vendre des livres à des étudiants d’une autre haute école.

Les représentants étudiants ne peuvent plus tolérer non plus que l’ambiance de travail au sein de l’établissement soit compromise par des affrontements entre collègues, à savoir ceux qui soutiennent Nadia Geerts et qui exhortent leurs collègues de les rejoindre, qui les traitent de lâches sur les réseaux sociaux et qui attaquent le Conseil étudiant contre ceux qui n’ont aucune objection à émettre quant à l’autorisation du port de signes convictionnels dans l’enseignement supérieur et qui subissent la situation.

L’acharnement de Nadia Geerts aura eu des conséquences importantes sur la HE2B mais aussi sur ses étudiants, son personnel qui n’ont absolument rien demandé et cela a également eu un grand impact sur notre travail et réussite personnel. Nous savons qu’il peut être délicat pour les autorités de la Haute École d’intervenir avec une telle épée de Damoclès au-dessus de la tête, à savoir le risque qu’un article incendiaire et réadaptant la réalité ne soit publié par N. Geerts à la moindre de leur réaction mais nous pensons qu’il est plus que temps de penser à la HE2B, à l’intérêt général et à l’ensemble des êtres humains qui composent celle-ci.

Enfin, la mission principale d’un conseil étudiant est de défendre et promouvoir les intérêts des étudiants. Dans cet objectif, les représentants étudiants auraient pu rester discrets mais quand les attaques que leur établissement d’enseignement supérieur et eux-mêmes subissent les empêchent d’accomplir correctement leurs missions et nuisent à l’image de leurs étudiants, ils se doivent de réagir collectivement et d’exposer leur vérité. Nous avons tenté de joindre le Pouvoir Organisateur ainsi que le Collège de direction pour qu’une solution interne soit trouvée mais nous n’avons pas reçu de réponse. À travers ce silence, WBE n’est pas dans la capacité de garantir notre sécurité au vu des attaques et insultes dont nous avons fait l’objet de la part de personnes qui ont lu les publications mensongères de Madame N. Geerts. Pour ces raisons, si aucune réaction ne vient de leur part, nous envisagerons des actions plus concrètes et une plainte plus explicite.”

Que répond Nadia Geerts ?

Nous avons soumis le courrier du Conseil étudiant à l’intéressée. Elle nous a répondu par écrit. Concernant le reproche du Conseil étudiant envers les articles de Nadia Geerts consécutifs à l’autorisation du port des signes convictionnels dans l’enseignement supérieur, l’enseignante déclare : “En réalité, les articles ont repris non pas après la décision de WBE (relative au port des signes convictionnels, ndlr), mais après une seconde salve d’attaques sur les réseaux sociaux, déclenchée par cette décision, et à laquelle le Conseil étudiant n’est pas étranger puisqu’il a clairement accordé du crédit à l’une d’entre elles, qui fait l’objet d’une plainte au civil”. 

Nadia Geerts se défend aussi de faire l’objet de plaintes récurrentes de la part de ses étudiants. “Dès le début de cette histoire, j’ai demandé à rencontrer mon directeur, (…), et lui ai explicitement posé la question “des étudiants se sont-ils déjà plaint de comportements problématiques de ma part (racisme, islamophobie?)”  Sa réponse a été très claire : non, jamais. (…) J’ai également reçu de nombreux messages de soutien d’étudiants qui m’estimaient injustement attaquée. Quant à mon insécurité, je maintiens que je n’estime plus envisageable de me rendre dans mon école à des moments où l’on saurait pouvoir m’y trouver , ce qui n’a rien à voir avec le fait de m’y rendre sans que personne ne soit au courant de ma présence, qui plus est lorsque les cours se donnent en distanciel.”

Concernant les critiques du CE au sujet de l’“acharnement de Nadia Geerts”, celle-ci réplique : “J’estime quant à moi que c’est l’acharnement du CE qui est hautement problématique. J’ai démissionné du Conseil Pédagogique et introduit une demande de mutation, je suis en droit de me demander ce qu’il leur faut de plus pour enfin cesser de m’attaquer sur tout et n’importe quoi. Mon impression est qu’il cherche à me faire taire, ce qui est, je le dis clairement, trop demander.”

Enfin, Nadia Geerts affirme “n’avoir proféré aucun mensonge et estime donc cette accusation calomnieuse”. L’enseignante conclut: “dans cette affaire, il n’est pas question de signes convictionnels, mais d’attaques dont je suis victime sur les réseaux sociaux pour avoir défendu Samuel Paty, puis avoir regretté très laconiquement le changement de règlement des études de WBE. Ces attaques ont fait l’objet de deux plaintes avec constitution de partie civile, plaintes soutenues par WBE d’ailleurs.” 

RTBE


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