La prison animale – le parc zoologique – du bois de Vincennes est à nouveau ouverte au public, qui peut, nous assure-t-on, apprécier l'”environnement naturel” des détenus reconstitué le plus fidèlement possible ; non loin de là, et du centre de rétention administrative, le public pourra apercevoir un autre “zoo”, la “zone” où se concentrent les cabanes et tentes de sans abri, victimes, eux, de l'”environnement économique“. Le photo-journaliste Stéphane Remael les a rencontrés.
Régis, 49 ans, cinq ans de cabane. Sa bicoque est un assemblage très personnel de branches et de bâches. Une vraie petite maison, avec des casseroles pendues, un vaisselier, un canapé vieillot, et quelques journaux. Au fond, plantée derrière un paravent, une tente igloo: sa chambre.
Thierry, 52 ans, trois ans de cabane. Thierry est le mystique du bois. Cet ancien menuisier se retrouve à la rue après plusieurs dépressions. Il s’est construit un petit autel au fond de son abri, où il prie Dieu et Bouddha.
Chantal, 50 ans, 1 an de tente. On la surnomme « la mama de la rue » parce qu’elle pousse les jeunes exclues à se chercher un logement. « Les filles sont très vulnérables. Si t’es seule, les mecs, ils te sortent leur machin et ils disent : vas-y, on baise. Ensuite, ils te frappent comme ils veulent. Et faut pas compter sur les flics pour venir t’aider. » Pour se protéger de ces violences urbaines, Chantal a vécu plusieurs mois à Vincennes. « Cette fois, ce sont des gens de ‘la haute’ qui m’ont emmerdée. »
Jean, 64 ans, trois ans et demi de cabane. Cet ancien carreleur n’aime pas tellement se promener dans le bois. Mais il est capable de rester des heures, des années sous sa bâche rafistolée, à papoter et à refaire le monde ; un monde dont il s’est exclu, après quinze ans de rue. « On n’est moins bête qu’on en a l’air. » A Vincennes, Jean se sent « bien et pas bien. » Il apprécie la vie sauvage, mais regrette d’avoir construit son toit si près d’une route passante. Il a pourtant renoncé à déménager. « On ne campe pas n’importe où, il y a de plus en plus d’habitants dans le bois. Nous avons nos propres règles de savoir vivre ».
Dédé, 60 ans, 2 ans de cabane. On le connaît comme « Dédé le boulanger ». Dans une autre vie, André se levait tous les matins à l’aube pour faire son pain. « Je faisais aussi les gâteaux, la caisse… Quand t’es patron, faut savoir tout faire. »























